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Présentation ANDREA MARTINEZ et MICHÈLE OLLIVIER, Université d'Ottawa Malgré la pléthore d'études sur la tension tradition-modernité, rares sont cependant les publications de langue française qui examinent cette dualité à partir de l'expérience de femmes issues de groupes minoritaires. Leprésent ouvrage,commelecolloque qui en est àl'origine, tente de combler ce vide à partir d'une question aussi simple qu'immense :en cetournantde millénaire,comments'exprime latension tradition-modernité chezdes femmes qu'une double référence à l'altérité et à l'infériorité de genre - autochtones, francophones vivant en milieu minoritaire et migrantes des villes et des pays -, condamne à des particularismes ethniques, linguistiques ou culturels consubstantiels au statut de «traditionnelles opprimées ».Regroupantsept chercheures dont les intérêts et itinéraires1 illustrent la diversité et les convergences de la recherche féministe francophone, l'ouvrage explore les construits socioculturels qui orientent à la fois l'interprétation du monde et l'action sociale de ces trois groupes de femmes. Sont ainsi abordés les enjeux de la violence conjugale, du travail obligatoire, de la citoyenneté et des nouvelles technologies de l'information,quatrethèmesquicanalisent une partie desstratégies d'auto-représentation etdereconstruction identitaire de cesfemmes. Guidés par une préoccupation commune, soit démasquer les discours qui enferment les femmes dans une structurebipolaireoscillant entre « l'inscription généalogique » commebaromètre de la soumission aux loisdelanature et «l'émancipation individuelle »réservée aux esprits éclairés des Temps Modernes2 les textes ici réunis se croisent, se complètent et parfois même se confrontent, imprimant au recueil un 2 LA TENSION TRADITION-MODERNITÉ caractère résolument dynamique. Sans doute la richesse et la complexité des construits socioculturels des femmes en position minoritaire expliquent ledésaveud'un clivageartificiel auxconséquences néanmoins bien réelles (persistance de l'androcentrisme et de l'ethnocentrisme notamment). Tranchant dans le vif des préjugés, ce collectif s'attache à montrer que l'arrimage des traditions aux stratégies d'intégration et d'exclusion transcende la dichotomie habermassienne entre cadre institutionnel (raison culturelle)et cadre rationnel par rapport à une fin (raison utilitaire). Dansun contextemarquépar l'émergence/ résurgence d'affirmations identitaires multiples, la résistance à l'égard de la rationalité instrumentale prend inévitablement descolorations différentes allantdelaréactivationàlatransgression-provocation destraditions. C'est ainsi que, selon la communauté d'origine, les « ancrages » culturels (religion, langue, rapports à la famille, au travail, à l'espace et au temps) jouent un rôle de référence sociale et relationnelle à géométrie variable. Paradoxes et tensions au sein de lamodernité Au sens philosophique le plus large, la modernité correspond à la « pensée en progrès », comprise comme le double mouvement d'émancipation de l'individu et de création d'un espace public, encore largement inachevé mais tourné vers les principes d'égalité, de justiceet de libertéhérités des Lumières.Enséparant la religion de la société civile, la raison ou Aufklàrung devait libérer hommes (et femmes?) de la peur et de l'obscurantisme, en apportant à l'imagination l'appui du savoir.Cette rupture avec l'ordre socio-religieux promet alors d'assurer une dynamique de l'individuation fondée sur le contrat social plutôt que sur lesliens du sanget de l'amitié. «Leshommesnaissent et demeurent libres et égauxen droits »proclame dès 1789 en Francela Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Là réside le mythe fondateur de la modernité :lepouvoir incarné par l'autorité divine (Papauté, Églises, Roi ou Empereur) cesse d'être transcendant, pour s'instituer en État de droit prônant l'égalité formelle de tous les citoyens et trouvant dans la nature une légitimité nouvelle. La tension tradition-modernité renvoie ainsi à un moment charnière de l'histoire des sociétés occidentales, moment de « grande transformation », pour reprendre l'expression de Polanyi (1983), entre sociétés dites traditionnelles et celles qui se veulent modernes. Cette distinction correspondà l'opposition weberienne, reprise par Habermas, entre deux types de rationalité et de sous-systèmes s'y rattachant. Très succinctement, rappelons que la première (société traditionnelle) est NT [3.145.77.114] Project MUSE (2024-04-19 19:51 GMT) PRÉSENTATION gouvernée par l'activité communicationnelle, médiatisée par des symboles, des normes et des valeurs, et ancrée dans les institutions familiales et religieuses. Définie à m...

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