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La galette traditionnelle se fait à base de farine, de graisse, d’eau calme et de sel. La farine habituellement employée sur nos îles provient du bjøerne, de l’orge locale très foncée et riche, dont le grain dépasse en longueur l’orge d’Ailleurs. Les jeunes garçons des îles récoltent le bjøerne en plein été ou vers la fin de celui-ci, selon le vent et les conditions météorologiques. On vanne ensuite l’orge pendant les trois jours qui suivent la nuit de la Saint-Ulaf, à l’exception des années où la pleine lune précède les saintes oblations traditionnelles. Dans ces rares occasions, on peut procéder au vannage à n’importe quel moment, pourvu que l’on allume une bougie faite de houx à l’entrée de la grange. Si le houx vient à manquer, on peut le remplacer par du suif. Jadis, la farine des galettes était moulue à l’aide d’une meule en pierre. De nos jours, on a plus souvent recours à la force du vent et de l’eau. On prétend même que la population de l’île de Strell moud une grande partie de sa farine au moyen des ondes lumineuses. Puisque vous connaissez déjà la longitude et la latitude de notre archipel ainsi que le volume de ses précipitations annuelles, je me contenterai de vous faire part de quelques coutumes locales. Les îles qui composent notre patrie sont Les galettes : variétés et usages 34 Le Carnaval du quotidien Naust, Spoy, Strell, Upper Strell, Cailee, Papa Cailee, Nack, Breen, Little Breen (domaine des Jambes-Nues) et Lum, en l’occurrence mon lieu de naissance et d’existence. Les habitants de chacune de ces îles se nourrissent de galettes, hormis ceux de Naust qui refusent d’en manger et qui craignent même d’y toucher. Leur alimentation repose plutôt sur des petits pains qu’ils confectionnent à partir d’un mélange de farine et de lait, dont le volume gonfle à coup de prières. Le peuple de Naust fixe des fers aux sabots de leurs animaux de trait afin de protéger leurs pieds bestiaux du poison qui s’agite sous l’action des charrues et des herses. Les populations indigènes de Strell et d’Upper Strell partagent un penchant pour les galettes en forme de cercle avec un léger creux en plein centre. Leurs fers témoignent aussi de cette prédilection pour la circularité : les deux pointes traditionnelles ont depuis longtemps fusionné dans le but d’éliminer toute rupture ou séparation visible. Les garçons reçoivent leur fer à l’âge de douze ans, et les filles, à quatorze ans. La petite île de Spoy ne s’est toujours pas convertie au lum-bode. Pour faire cuire les galettes, les habitants ont recours à un couloir vertical de briques ou de pierres taillées qui laisse s’échapper la fumée des maisons. Ils clouent un fer au-dessus de ce couloir avant de passer à la cuisson, en veillant à ce que les branches pointent vers le ciel, une marque de respect et aussi de malédiction. Les aïeux de Spoy désignent les galettes sous les termes de fletcake et de platter-brød, mais ces expressions se font de plus en plus rares. Bien que les galettes foisonnent sur l’île de Cailee, on prétend que les marins évitent à tout prix de s’en procurer auprès des femmes locales. Les braves hommes doivent s’aventurer en mer sans la moindre réserve de galettes et sans les prières féminines dont se prémunissent les habitants des autres îles contre le désordre et les caprices. Les habitants de Cailee portent leur fer suspendu à une lanière de cuir autour du cou. Avant de partir en voyage, ils font une profonde révérence et embrassent solennellement leur fer courbé, un [18.223.106.232] Project MUSE (2024-04-25 02:25 GMT) Les galettes : variétés et usages 35 geste qui est censé protéger du malheur tout ce qui leur apporte bénédiction et motivation dans la vie. Compte tenu du faible nombre d’habitants sur l’île de Papa Cailee, les galettes y sont cuites collectivement. Comme le veut la tradition, les hommes mélangent la farine et l’eau dans un grand bol, puis les femmes se réunissent pour y ajouter la...

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