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  • Les Françaises, les Français et l'Epuration (1940 à nos jours) par François Rouquet et Fabrice Virgili
  • Edward Ousselin
Les Françaises, les Français et l'Epuration (1940 à nos jours). Par François Rouquet et Fabrice Virgili. (Folio. Histoire, 274.) Paris: Gallimard, 2018. 820 pp., ill.

Comme l'indique son titre, ce livre prend en considération les effets souvent dissemblables de l'Occupation et de la Libération sur les Françaises et les Français: 'Les relations entre les femmes et les hommes ne sont pas seulement perturbées durant la guerre, leurs identités respectives le sont également et durablement' (p. 31). D'autre part, le processus multiforme de l'Épuration est conçu comme ayant commencé avant la Libération et ayant duré bien au-delà (longue d'une vingtaine de pages, la Chronologie qui accompagne ce gros volume va de 1938 à 2017). Plutôt qu'une simple étude politique sur les événements légaux et extra-légaux qui ont suivi la libération du territoire français (de 1944 à 1945), François Rouquet et Fabrice Virgili ont donc voulu produire une histoire sociale de l'Épuration, qui tient compte à la fois de sa dimension populaire et de la question du genre: 'cette dimension sociale invite à sortir d'une vision nébuleuse stéréotypée d'une logique des foules, pour privilégier la compréhension des nombreux acteurs et actrices, considérer leurs motivations, leurs choix et leurs décisions, bien plus variés et conscients qu'on ne le dit souvent' (p. 30). Les auteurs rappellent que le terme 'épuration' renvoie à la nécessité d'une purification de la société française, qui avait été souillée par la présence de l'occupant allemand. Il ne s'agissait donc pas uniquement de punir les collaborateurs, mais aussi de les exposer, de faire connaître leurs actes, y compris en les obligeant à s'exhiber en public sous les huées, les insultes et les crachats. Pour les collaboratrices, au [End Page 338] défilé imposé dans les rues s'ajoutait une autre humiliation publique. Rouquet et Virgili estiment à vingt mille le nombre de femmes tondues après la Libération: 'La tonte n'est donc pas seulement le châtiment d'une collaboration sexuelle, dite alors "horizontale", mais le châtiment genre ou sexué de la collaboration. Parce qu'elles sont des femmes, les collaboratrices encourent une punition supplémentaire' (pp. 116–17). La dimension symbolique de la purification du corps national s'exerçait ainsi avec des conséquences particulièrement dégradantes sur le corps des femmes. En ce qui concerne le nombre des exécutions sommaires, un sujet qui a longtemps soulevé des controverses, les auteurs, s'appuyant sur plusieurs études, indiquent que ce nombre était d'environ neuf mille. Le nombre de personnes accusées et internées pour des faits de collaboration était bien plus élevé: environ cinquante mille à la fin de l'année 1944. Même si ce niveau d'internement a rapidement diminué, il est clair que l'Épuration a été un phénomène de masse. Rouquet et Virgili analysent évidemment les procès célèbres (Pétain, Laval, etc.), mais aussi le fonctionnement des tribunaux pour les accusés moins connus. Un chapitre est également consacré aux situations diverses (avec des jugements et des punitions souvent plus expéditifs) dans les autres pays européens récemment libérés. Le chapitre final aborde la question de la mémoire de l'Épuration, qui est restée très présente jusqu'à nos jours. On ne peut que recommander cette étude très détaillée et complète d'une période cruciale de l'histoire sociopolitique de la France.

Edward Ousselin
Western Washington University
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