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Reviewed by:
  • Intimacy and Distance: Conflicting Cultures in Nineteenth-Century France by Philippa Lewis
  • Françoise Grauby
Intimacy and Distance: Conflicting Cultures in Nineteenth-Century France. By Philippa Lewis. Cambridge: Legenda, 2017. 187 pp., ill.

Le livre de Philippa Lewis cherche à éclaircir ce dispositif complexe qu'est la culture de l'intime dans la France du dix-neuvième siècle, pendant la période qui s'étend de la Monarchie de Juillet au Second Empire, en privilégiant une approche totalisatrice. L'ouvrage ne se contente pas d'explorer les productions littéraires de l'intime (du roman intime au récit de voyage) mais s'appuie sur une belle et riche variété de formes littéraires et culturelles (journaux intimes, portraits littéraires, critique d'art) pour mettre en évidence la hiérarchie des valeurs à l'œuvre dans la notion d'intime. Certes, romans, journaux et poésies intimes, avec leur cortège de beaux sentiments et d'amitiés indéfectibles, font les beaux jours des années 1830 mais réserve et pudeur restent des valeurs fondamentales. Chaque chapitre suggère ainsi des points de contact entre les deux pôles majeurs de la culture au dix-neuvième siècle: les douceurs d'un domaine privé circonscrit à la sphère domestique et une aspiration plus virile au dépaysement. Si José-Luis Diaz rappelle que le dix-neuvième siècle est celui de l'intime, 'si l'on se fie ne serait-ce qu'au déploiement sans précédent du mot' (cité p. 19), la notion est subtilement sondée dans toutes ses nuances et complexités par Lewis, autant pour ce qu'elle recèle d'ambiguïtés et de réticences que d'adhésions. Le propre de l'ouvrage est en effet d'énoncer les multiples formes de l'épanchement en tension avec un désir d'émancipation, et ce n'est pas un des moindres mérites du livre que de nous rappeler que l'un ne peut se dire sans l'autre. L'expression d'émotions partagées peut certainement apporter des récompenses esthétiques, affectives ou économiques aux écrivains mais elles peuvent tout aussi bien être stigmatisées comme féminines, infantiles ou frivoles. Ainsi Baudelaire, Barbey d'Aurevilly et Flaubert adoptent une même posture consistant à réconcilier émotions intimes et codes publics en limitant et délimitant les manifestations du mode intime. Manier l'ironie ou la distance (les Memoranda de Barbey d'Aurevilly forment un bon exemple) permet de varier par degrés la charge affective et d'éclairer le conflit entre intimité, distance et anxiété. Certains récits de voyage ont recours à l'humour. Le Voyage en Égypte de Flaubert, La Belgique déshabillée de Baudelaire, partagent les mêmes obsessions pour les familiarités plus ou moins scabreuses des lieux étrangers. Dans le domaine de la critique littéraire, qui s'articule en termes d'amitiés et d'affections, la rhétorique des portraits littéraires de Sainte-Beuve publiés dans la Revue des Deux Mondes de 1830 à 1845, tient une place à part. L'investissement affectif à l'encontre d'une communauté littéraire fait de l'intime un élément idéal animant les portraits et encourageant les liens émotionnels entre écrivains, lecteurs et critiques. Repenser l'intime, comme le fait Lewis, permet d'éclairer ce pacte entre des préoccupations contradictoires. Les écrivains continuent à aspirer à l'intime comme modèle relationnel et littéraire pendant tout le dix-neuvième siècle, mais les contraintes esthétiques ou idéologiques exigent d'eux qu'ils repensent et reformulent la charge affective de leurs confessions. [End Page 459]

Françoise Grauby
University of Sydney
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