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  • Samedi 22 août 1914. Un médecin dans la bataille by Sophie Delaporte
  • Helena da Silva
Samedi 22 août 1914. Un médecin dans la bataille Sophie Delaporte Paris: Édition Odile Jacob, 2016, 208 p., 21,90 €

Sophie Delaporte, spécialiste en médecine de guerre, en particulier durant la Grande Guerre, est l'auteure de plusieurs livres traitant de ce sujet. Cependant, celui-ci est différent, car l'historienne a choisi une méthode originale, faisant un pari risqué, mais de toute évidence réussi. Elle part d'un ensemble de sources historiques pour reconstituer une journée dans la vie d'un médecin fictif sur le champ de bataille de la Première Guerre mondiale. La rareté des récits de médecins sur le champ de bataille (moins d'une vingtaine selon elle) explique ce choix. Sophie Delaporte s'est donc attelée à cette tâche en utilisant des sources historiques qu'elle connaît bien, tels les carnets de l'aspirant Lucien Laby1, mais aussi des rapports de captivité de médecins ou encore des journaux de marches et d'opérations.

Ce livre raconte ainsi une journée de la vie d'un médecin sur le champ de bataille autour de Rossignol et Neufchâteau (dans les Ardennes belges) le 22 août 1914, lors de la journée la plus meurtrière de l'histoire militaire française (p. 17). Narcisse, personnage « fictif », était encore étudiant en médecine, comme beaucoup de ses collègues mobilisés, peu expérimenté et encore moins préparé à ce qu'il allait vivre. Ce livre donne une vision d'en bas, amenant le lecteur à découvrir la réalité de la guerre par le regard d'un médecin des champs de bataille, pendant une journée qui reflète ce qu'auraient été les quatre ans de guerre. Il était alors impossible d'imaginer toute la violence que la guerre totale infligerait au corps humain. L'auteur nous mène dans les champs de bataille en décrivant de façon détaillée les événements, les pratiques médicales ou plutôt l'incapacité de procurer des soins face aux conditions extrêmes dans les champs d'horreur et de mort. À travers ce livre, le lecteur peut mieux se rendre compte de l'impact de la brutalité du combat sur la pratique médicale et ce qui a été concrètement mis en œuvre pour y faire face.

L'auteure a divisé son ouvrage en cinq parties et a commencé par la fin chronologique, rappelant au lecteur que la guerre n'était pas terminée pour ceux qui l'ont vécue. Le retour à la vie civile avec un bagage de souvenirs douloureux était un nouveau défi à surmonter après les combats. Face à un accouchement difficile, Narcisse doit ainsi intervenir alors qu'une femme ensanglantée s'efforce de donner la vie. Cette scène est suivie dans le reste du livre par d'autres où les [End Page 229] hommes combattent et se donnent la mort. Cet épisode déclenche chez Narcisse des souvenirs de la guerre et la suite du récit est traitée chronologiquement, en partant de sa mobilisation, sur le mode cinématographique du flashback. Cette première partie décrit le quotidien d'un nouveau médecin arrivé sur les champs de bataille, avec ses attentes, ses sentiments et ses inquiétudes telles que la peur de la mort.

Les quatre autres parties racontent la journée du 22 août de façon détaillée, laissant bien comprendre le choc du jeune Narcisse face à la violence déchaînée des combats. Y sont décrites des amputations ou des blessures du visage avec un souci du détail tel que le lecteur comprend rapidement l'improvisation du personnel soignant dans des postes de secours de fortune. Au fil du texte, par les récits des soldats blessés, on découvre également leur vécu de la journée dans « des champs de cadavres » (p. 150), permettant ainsi à l'auteure de ne pas uniquement se focaliser...

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