In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Voices in the Media: Performing French Language Otherness by Gaëlle Planchenault
  • Michaël Abecassis
Voices in the Media: Performing French Language Otherness. By Gaëlle Planchenault. (Advances in Sociolinguistics.) London: Bloomsbury, 2015. x + 210 pp, ill.

L’enregistrement de la voix a été l’un des phénomènes marquants du début du vingtième siècle, et il s’inscrit dans un domaine qui n’a été que très rarement abordé par les linguistes. Dans cet ouvrage Gaëlle Planchenault explore la spécificité de la voix telle qu’elle s’entend dans les médias, sous toutes ses formes, stéréotypée, sexuée ou non, que ce soit dans le cinéma francophone, sur des sites internet ou dans les métiers du doublage de films en français. La voix est un ensemble, elle est associée à une articulation, à un phrasé et tout particulièrement à un accent. L’accent demeure un terme portemanteau qui a une valeur purement subjective, car l’accent, comme l’a indiqué la linguiste Françoise Gadet, ‘c’est toujours l’autre qui en a un’ (‘Français populaire: un concept douteux pour un objet évanescent’, Ville–école–intégration enjeux, 130 (2002), 40–50 (p. 49)). Il varie selon les régions, les classes sociales et les ethnies. Dans le cinéma, on ne gomme pas l’accent, mais on l’utilise au contraire pour la comédie, comme l’accent méridional, espagnol, juif pied-noir ou encore l’accent stylisé picard comme dans le film Bienvenue chez les Ch’tis (dir. par Dany Boon, 2008). Mis à part les films qui se veulent ‘régionaux’, on se retrouve [End Page 330] souvent avec des acteurs ‘parisiens’ qui jouent la région ou la banlieue. L’allongement de la pénultième dans la voix gouailleuse d’Arletty (atmosphère, atmosphère . . .) devient un des traits marquants du vernaculaire parisien, renforcé dans les films des années 1930, par contraste avec l’accent soutenu des personnages éduqués. Le cinéma, en intégrant des faits, des stéréotypes qui grossissent la caricature avec des acteurs qui souvent surjouent, crée une surreprésentation et ainsi une forme d’aliénation linguistique de la communauté discriminée. Du coup lorsque la voix se met en scène, elle se travestit et se codifie, comme un joyau qui se travaille, au point de devenir indépendante du corps qui l’émet. La voix, qu’elle soit accentuée ou ‘de couleur’ (emprunte d’une couleur locale ou d’exotisme associée à une personne de couleur), peut aussi être à la fois vecteur d’une idéologie, ou devenir une marchandise et une source de profit, qui obéit aux lois de l’offre et de la demande sur les marchés du cinéma international, tout comme un objet de stigmatisation. Cette étude unique est particulièrement recommandée aux étudiants de langue française et d’études cinématographiques pour une meilleure compréhension de la manière dont un univers social est représenté par la voix de ses protagonistes, ou dont un comédien doubleur est choisi dans un rôle en fonction non pas de ses origines et de la couleur de sa peau mais de sa qualité vocale. Cet ouvrage nous révèle la présence d’un genre codifié, sur la scène médiatique, véhiculant à travers la voix de ses participants, à la fois une marque identitaire et idéologique. À la lecture de cette étude, on ne peut rester insensible à la tessiture des voix qui nous entourent, et il est probable que l’on percevra différemment l’imaginaire linguistique dont elles sont porteuses. [End Page 331]

Michaël Abecassis
Université d’Oxford
...

pdf

Share