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  • Une légende du maquis. Georges Guingouin, du mythe à l'histoire by Fabrice Grenard
  • Laurent Douzou
Fabrice GRENARD.–Une légende du maquis. Georges Guingouin, du mythe à l'histoire, Paris, Vendémiaire, « Chroniques », 2014, 603 p.

Venu à l'histoire des maquis par le biais de la question du ravitaillement dans la France vaincue et occupée, puis des zones de non-droit constituées dans le sillage du phénomène maquisard, Fabrice Grenard a consacré son mémoire d'habilitation à diriger des recherches à l'un des chefs de maquis les plus prestigieux de la Résistance, Georges Guingouin (1913-2005). Ce dernier fut, selon les termes de la citation le faisant chevalier de la Légion d'honneur en août 1945, un « extraordinaire entraîneur d'hommes » et « l'une des plus belles figures de la Résistance ». En dépit de la prose convenue de ce type de document, ces mots touchaient juste s'agissant de ce résistant, distingué au surplus par la croix de la Libération en octobre 1945. C'est bien là une difficulté majeure à laquelle dut se confronter Fabrice Grenard.

Ses exploits, précise-t-il d'emblée, sont si nombreux, sa geste si héroïque qu'il est […] difficile de distinguer ce qui relève de la réalité ou d'une légende qui n'a cessé de se développer à la faveur du combat clandestin mené par celui que ses partisans avaient surnommé « Le Grand » et dont le portrait figurait en bonne place, à la fin de la guerre, dans de nombreuses fermes de Haute-Vienne et de Corrèze

(p. 8).

Voilà le lecteur prévenu, par un biographe sur ses gardes, de la difficulté de l'entreprise. C'est que la personnalité et la trajectoire du personnage, comme la légende née immédiatement de son action, rendent l'étude complexe.

Guingouin est le fils d'un sous-officier de carrière tué au combat le 28 août 1914 et d'une institutrice qui l'a élevé seule. Converti au communisme à l'école normale de Limoges, nommé en 1935 instituteur à Saint-Gilles-les-Forêts, commune rurale de 200 habitants au pied du mont Gargan, il devient le principal animateur du PCF dans le « rayon » d'Eymoutiers. C'est un caractère entier, un ascète qui développe un militantisme rigoriste qui lui vaut le surnom de « moine du mont Gargan ».

Mobilisé en août 1939, il est de retour à Saint-Gilles-les-Forêts fin juin 1940. Suspendu en octobre de ses fonctions d'instituteur, toujours secrétaire de mairie, il s'occupe dans le secteur d'Eymoutiers de la propagande clandestine et des faux papiers. Il entre en clandestinité totale en février 1941. Traqué, il doit se cacher dans des souterrains, des maisons abandonnées ou des cachettes improvisées dans les bois. Malgré cela, il décline l'offre du parti d'intégrer la direction politique de la Haute-Vienne, de la Creuse et de l'Indre, ce qui impliquerait de s'installer à Limoges. Sa liaison avec l'appareil est coupée et il connaît une période d'errance entre la Haute-Vienne et la Corrèze. De juillet 1941 à juillet 1942, il trouve refuge en Haute-Corrèze avec son camarade Georges Ceuille. Ils vivent vraiment à la dure et c'est miracle qu'ils ne soient pas arrêtés.

Fin avril 1942, Gabriel Roucaute, responsable communiste pour le Sud-Ouest, le désavoue en lui rappelant que la priorité du parti, ce sont les zones urbaines. Guingouin reçoit l'ordre de recentrer son action sur Brive, Tulle et Ussel. Devant son refus d'obtempérer au motif que toutes les guerres de partisans se sont d'abord gagnées dans les campagnes, on lui suggère en vain une mutation à Clermont-Ferrand. À la fin de l'été 1942, de sa propre initiative, il revient dans son secteur d'Eymoutiers. Il y déploie une forte activité de sabotage et est peu à peu conduit à repenser l'hébergement et l'encadrement des hommes qui le rejoignent ; c'est ainsi que son maquis...

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