Abstract

Inscrit dans le contexte de la Traite négrière transatlantique, Humus de Fabienne Kanor restitue des voix oubliées par l’histoire : celles de femmes arrachées pour la plupart d’Afrique de l’ouest et transportées de force en 1774 à bord du négrier, Le Soleil, pour être réduites en esclavage dans les colonies américaines et les Caraïbes. En réinventant l’épisode de la traversée comme moment d’une affirmation de leur subjectivité subalterne, et en opposant leur cri de captives au journal technique et lacunaire du capitaine du bateau, la polyphonie mémorielle du roman révèle une version complexe et composite de l’histoire, suivant une esthétique de l’éclatement et de la fragmentation, qui est au principe de la parole archipélique. Ce que l’oralité littéraire et l’assemblage romanesque explorent alors, c’est en quoi le recouvrement des mémoires, l’entremêlement des vécus intimes et l’articulation d’une conscience intersubjective tracent l’espace d’une solidarité et d’une résistance performatives, qui dévoient les absolus de l’histoire coloniale écrite de la seule perspective des puissants et des Européens.

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