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  • Vichy au Canada. L'exil québécois de collaborateurs français par Marc Bergère
  • Hugues Théorêt
Bergère, Marc–Vichy au Canada. L'exil québécois de collaborateurs français, Montréal, Les Presses de l'Université de Montréal, 2015, 324 p.

Depuis les années 1990, la question de la perméabilité du Canada français au vichysme et au pétainisme suscite un vif intérêt chez les historiens et les chercheurs qui tentent de remonter la filière des collaborateurs français au régime de Vichy dirigé par le maréchal Pétain qui, après la libération de la France en 1945, sont venus trouver refuge en sol québécois pour fuir la justice française.

On pense au livre d'Yves Lavertu, L'affaire Bernonville. Le Québec face à Pétain et à la collaboration, publié à compte d'auteur en 1994, et aussi à l'ouvrage d'Éric Amyot intitulé, Le Québec entre Pétain et de Gaulle, publié en 1999. Marc Bergère ajoute sa voix au chapitre en publiant aux Presses de l'Université de Montréal une œuvre fort bien ficelée intitulée Vichy au Canada. L'exil québécois de collaborateurs français. Le maître de conférences en histoire contemporaine à l'Université de Rennes 2 parle d'une histoire de l'exil des « réprouvés » de la collaboration poursuivis dans leur pays et qui ont pris le chemin de l'exil politique pour cette raison. Bergère perçoit ces collaborateurs français–on en compte au moins six–qui débarquent en douce au Québec comme des réfugiés politiques et ce, « même si ce statut est parfois plus difficile à admettre en France » (p. 13-14).

Selon l'auteur, la mobilisation en faveur des « réfugiés français » ne serait pas la preuve d'une influence persistante du pétainisme au Québec. L'historien précise que ce qui se joue au Québec après 1945 n'est pas le simple reflet ou le prolongement de ce qui se passe ou se dit en France au même moment.

L'ouvrage de Bergère a le mérite d'utiliser des sources des deux côtés de l'Atlantique. De fait, il apporte à cet épineux dossier l'éclairage de sources françaises ignorées jusqu'alors, ce qui ajoute de la crédibilité et du poids à son propos. L'emploi des journaux canadiens-français aide par ailleurs à se forger une opinion plus claire de la perception qu'avait le Québec des années 1940 de Vichy et Pétain. D'ailleurs, il ne manque pas de les citer. L'ouvrage de 324 pages compte un impressionnant total de 1220 notes de bas de page !

Dans les premiers chapitres, l'auteur étudie les rapports des Canadiens français à Vichy et examine les liens entre émigration politique et action diplomatique. Les archives diplomatiques françaises, précise-t-il, témoignent d'une volonté de la France de ne pas gêner le gouvernement canadien. À ses yeux, l'incidence de ce qu'il y a lieu d'appeler « l'affaire Bernonville » fut plus grande sur le plan politique intérieur canadien que sur les relations diplomatiques franco-canadiennes. Cette « affaire », rappelons-le brièvement, met en scène un dénommé Jacques Dugé de Bernonville, un milicien français qui avait été un rouage important au sein du régime de Vichy, notamment comme commandant des forces de maintien de l'ordre en Bourgogne. Pourchassé par la justice française après la guerre, Jacques Dugé de Bernonville quitte clandestinement la France pour le Canada en novembre 1946. Durant cette période, il se forge une nouvelle identité sous le nom de Jacques Benoît et bénéficie du soutien d'une frange de l'élite clériconationaliste québécoise. [End Page 453]

Dans le chapitre 3, l'auteur fait une analyse diplomatique de l'affaire des réfugiés politiques au Canada français. Il y démontre comment les représentants fran...

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