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Reviewed by:
  • Writing the Real: A Bilingual Anthology of Contemporary French Poetry ed. by Nina Parish, Emma Wagstaff
  • Jeff Barda
Writing the Real: A Bilingual Anthology of Contemporary French Poetry. Edited by Nina Parish and Emma Wagstaff. London: Enitharmon Press, 2016. 190pp., ill.

Cette anthologie bilingue prend le relais de The New French Poetry (Newcastle-upon-Tyne: Bloodaxe Books, 1996), ouvrage important de Jean Khalfa et David Kelley, paru il y a vingt ans. Alors que ce dernier cherchait à présenter la manière dont une certaine poésie d’après-guerre, en France, établissait un dialogue avec la métaphysique, le présent volume [End Page 435] s’intéresse aux multiples formes d’écriture qui émergent depuis la fin des années 1960 dans le champ culturel français. Composé de dix-huit sections dans lesquelles on retrouve autant des poètes établis (Christian Prigent, Philippe Beck, Anne Portugal) que des poètes relativement nouveaux (Stéphane Bouquet) ou moins connus du public anglophone (Oscarine Bosquet, Sabine Macher), cette anthologie compile des traductions préexistantes et de nombreux inédits. Le premier intérêt de l’anthologie, au-delà du fait qu’elle rend lisible nombre de textes importants, repose sur son parti pris méthodologique. Au lieu d’envisager ces poétiques selon le modèle avant-gardiste de la rupture ou selon le modèle universitaire de la taxonomie, Nina Parish et Emma Wagstaff font ici un tout autre pari: penser la poésie comme un espace mouvant, fait de ressemblances de famille, dans lequel s’invente, au-delà des querelles et écoles, une certaine manière d’écrire et de saisir le réel. Un réel qui se capture, par exemple, dans la contemplation d’un paysage (Jean-Michel Maulpoix), qui émerge d’une description banale où soudain une singularité fait sens (Nathalie Quintane) ou encore surgit de l’observation matérielle d’un document (le paradigme indiciaire de Jean-Marie Gleize) ou de l’archive (les ready-made d’Anne-James Chaton). Le second atout de l’ouvrage est qu’il permet de montrer la centralité de la traduction dans le travail des poètes, pour lesquels elle participe pleinement de la saisie du réel. C’est le cas de la poète d’expression allemande Macher qui élabore une poésie hétérolingue, mais aussi des poètes intéressés par la traduction intermédiale (la ciné-poésie de Jérôme Game; le dispositif photographique pour Gleize). Le troisième mérite de cet ouvrage est de montrer que malgré la résistance de cette poésie aux paradigmes herméneutiques traditionnels, elle n’est pas pour autant intraduisible ni dénuée de sens. C’est un véritable travail de ‘recréation’ où il ne s’agit pas de faire sonner le texte cible en anglais, ni de sacrifier le signifiant au signifié, mais de faire délibérément ressortir l’étrangeté du texte traduit avec ses bégaiements (Game), ses zézaiements (Prigent), ses effets de disque rayé (Christophe Tarkos) ou encore ses rebonds et freins (Portugal). Mieux, par la confrontation du texte source et du texte cible, la traduction fonctionne comme révélateur: elle fait apparaître, par exemple, un certain usage classique de la langue (Gleize); elle montre en quoi traduire est une pratique interculturelle (voir la devinette finale du poème de Chaton traduit brillamment par Parish) voire d’érudition (Beck traduit par Wagstaff). Comme la liste, l’anthologie est aussi faite d’oublis. On reprochera, peut-être, l’absence d’Anne-Marie Albiach, Olivier Cadiot, Suzanne Doppelt, Caroline Dubois, Emmanuel Hocquard —à moins que ces derniers ne fassent l’objet d’un second volume!

Jeff Barda
Cardiff University
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