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  • Afrique en présence. Du monde atlantique à la globalisation néolibérale par Jean-Pierre Dozon
  • Gabriella Djerrahian
Dozon, Jean-Pierre, Afrique en présence. Du monde atlantique à la globalisation néolibérale, Paris : Éditions de la Maison des sciences de l'homme, 2015, 197 pages.

Dans l'imaginaire occidental, l'Afrique est considérée comme l'antithèse de la modernité occidentale, une image qui s'appuie entre autres sur un prétendu retard structurel et technologique attribué à ce continent. L'ouvrage de Jean-Pierre Dozon présente de façon exhaustive la généalogie des multiples modernités enchevêtrées en Afrique, du point de vue de ses relations passées et présentes avec l'Europe et, plus récemment, avec d'autres puissances économiques telles que la Chine. Chronologiquement, l'analyse couvre la période de la traite négrière, du colonialisme, des indépendances africaines et de l'émergence des États. L'auteur explore ensuite l'établissement des partis politiques uniques et les crises qui en ont découlé, le mouvement tiers-mondiste, le développement en Afrique, le rétrécissement de l'État, et l'émergence de l'économie informelle dans le contexte du monde néolibéral.

À plusieurs égards, l'objectif principal du livre est d'accompagner le/la lecteur/trice pas à pas dans la réévaluation du rapport entre l'Afrique et la modernité. Cet objectif est poursuivi en donnant, d'une part, sa juste valeur au rôle de coconstructeur du continent africain de la modernité occidentale. D'autre part, l'ouvrage vise à insérer l'Afrique dans le monde contemporain en soulignant le fait que, loin d'être un continent écarté des courants actuels issus de la globalisation, il en est un acteur clé et les façonne d'une manière qui lui est propre. De ce point de vue, la relecture que propose Dozon d'une Afrique située au croisement de multiples modernités africaines, de la modernité occidentale et de la globalisation se matérialise non seulement en une étude des transformations colossales dont l'Afrique a été le théâtre. Elle est aussi réalisée en abordant d'autres sujets tangents, par exemple l'art africain et occidental, de même que la religion. Le fil conducteur de ces divers éléments est celui d'une pluralité hybride (politique, juridique, religieuse, ethnique) qui prend des formes novatrices et souvent inattendues. En ce sens, nous nous retrouvons face à une Afrique postmoderne bien avant l'heure.

Bien que l'auteur situe le début des échanges entre l'Europe et l'Afrique au XVe siècle, le récit de la modernité qu'il nous présente s'attarde avec justesse sur la période coloniale. Dans le second chapitre, l'auteur balise l'histoire du colonialisme pour dresser un portrait plus large de l'Afrique. Il met de l'avant, parallèlement aux nombreuses dévastations consécutives aux conquêtes et à l'arrivée des pouvoirs européens, l'action des Africains eux-mêmes face à ces évènements, particulièrement en ce qui concerne l'alliance entre les pouvoirs coloniaux et les diverses aristocraties locales africaines, allant jusqu'à l'invention de nouvelles autorités coutumières. Chez les musul-mans, par exemple, les confréries comme les Mourides sénégalais ont prospéré au sein du système colonial. Face aux transformations déjà en cours avant l'arrivée des Européens et intensifiées par leur présence, les pouvoirs coloniaux ont misé sur les aspects « traditionnels » et ruraux des territoires sous leur contrôle pour se faire une image de l'Afrique et élaborer des stratégies administratives. L'un des héritages durables de la période coloniale, soit l'arrière-plan des évènements survenus par la suite, est la répartition des peuples et des territoires. L'époque coloniale a également entraîné de multiples transformations dans les domaines ethnique, culturel et juridique, ainsi qu'une croissance religieuse notable, qui ont provoqué entre autres la réinvention des vies des locaux.

Le livre aborde également un autre d...

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