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Reviewed by:
  • French and Russian in Imperial Russia, I: Language Use among the Russian Elite; II: Languages Attitudes and Identity ed. by Derek Offord et. al.
  • Madeleine Van Strien-Chardonneau
French and Russian in Imperial Russia, I: Language Use among the Russian Elite; II: Languages Attitudes and Identity. Edited by Derek Offord, Lara Ryazanova-Clarke, Vladislav Rjéoutski, and Gesine Argent. (Russian Language and Society.) Edinburgh: Edinburgh University Press, 2015. xvii + 270 pp.; xvi + 266 pp.

Cet ouvrage, fruit des travaux d'une équipe de chercheurs animée par Derek Offord (Université de Bristol), offre une étude qui, pour la période de 1750 à 1850, d'une part examine les fonctions du français en Russie dans divers domaines ainsi que l'interaction entre français et russe (vol. I) et d'autre part met l'accent sur les rapports entre francophonie et formation d'une identité sociale, culturelle et politique ainsi que sur les réactions russes — appropriation ou distanciation — par rapport au bilinguisme et multilinguisme des élites (vol. II). L'enquête s'appuie sur un corpus varié qui comprend périodiques en français, manuels, théâtre, œuvres de fiction, textes polémiques. Les contributeurs font également un large usage de documents personnels (correspondances, journaux, alba amicorum) souvent inédits. La situation linguistique dans la Russie de cette époque s'inscrit dans le contexte du processus d'occidentalisation du pays initié par Pierre le Grand et poursuivi par Catherine II: il s'appuie sur l'apprentissage des langues étrangères jugé nécessaire pour transformer la Russie en une puissance européenne moderne. Le français, [End Page 145] langue de la diplomatie, de la société aristocratique, de la république des lettres, y occupe une place privilégiée. Ce processus induit également des changements sociaux et culturels avec l'émergence d'une noblesse adoptant un mode de sociabilité inspiré par le modèle français ainsi que la diffusion des idées des Lumières. L'identité voulue par les tsars n'est pas seulement européenne, mais aussi impériale et la connaissance et l'utilisation de langues étrangères en Russie permettent de façonner également une nouvelle image du pays et de la communiquer à l'Europe, comme le fait par exemple le francophone et francophile Aleksandr Stroganov (1736–1811), étudié par Rjéoutski et Somov (I, chapitre 3), qui associe pratique du français, mode de vie cosmopolite et sentiments patriotiques. Quant à la question du choix de langue et des formes de ce choix, on constate dans les documents personnels de Nikolai Karamzin un bilinguisme franco-russe qui serait caractéristique de la noblesse russe (Sapchenko, I, chapitre 8): le français n'est pas seulement utilisé comme langue de communication internationale, mais aussi avec des russophones et dans ce cas, le choix peut être dicté par l'étiquette, propre à la vie de cour, mais aussi par le désir d'exprimer des sentiments intimes d'amour ou d'amitié: le français se révèle alors langue du cœur nourrie de textes littéraires; il peut être aussi la langue de l'intellect et servir de véhicule pour des réflexions morales et philosophiques alors que le russe est plutôt le langage des événements des faits, des actions (Sapchenko, I, 159). La pratique du code-switching dans la correspondance familiale des Vorontsov témoigne aussi de ce passage au français pour l'expression de concepts abstraits (Tipton, I, 143). L'examen des lettres de Pouchkine confirme le choix du français dicté par le prestige dont jouit cette langue en Europe ainsi que par l'étiquette et montre également les influences littéraires françaises dans l'échange épistolaire. Cependant le russe constitue pour Pouchkine la langue de la communication personnelle, confidentielle. Ainsi, après son mariage, il écrit en russe à sa femme (qu'il a courtisée en français) (Dmitrieva, I, chapitre 9).

La perception que l'on se fait dans la société russe de ces usages des langues étrangères et de leurs effets fait l'objet du volume II. Sous...

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