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Reviewed by:
  • Les Américains de Paris. Hommes d'affaires, comtesses et jeunes oisifs (1880-1941) by Nancy L. Green
  • Tyler Stovall
    Translated by d'Aurore Clavier
Nancy L. Green Les Américains de Paris. Hommes d'affaires, comtesses et jeunes oisifs (1880-1941) trad. par P. Hersant, Paris, Belin, 2014, 510 p. et 16 p. de pl.

Si le mythe de l'«Américain à Paris» a inspiré des centaines de mémoires, de romans et d'études universitaires au fil des années, il est aussi devenu en lui-même une industrie touristique florissante alimentée par ces visiteurs américains qui cherchent à suivre les traces d'Ernest Hemingway, de Gertrude Stein et de Joséphine Baker dans la capitale française. Depuis l'époque de Thomas Jefferson et de Benjamin Franklin, aventuriers et romantiques venus de tous les États-Unis rêvent d'un séjour dans la Ville Lumière. Nancy Green s'attaque à ce mythe en tentant de dépasser les stéréotypes habituels pour éclairer la vie et les préoccupations quotidiennes de ces Américains installés à Paris au début du xxe siècle. Il en ressort un portrait encyclopédique, riche et admirablement nuancé, qui dépeint une communauté d'étrangers singulière, établie au cœur de la capitale française à l'ère moderne.

À l'instar de Brooke Blower, N. Green conteste l'idée que la plupart des Américains à Paris auraient été des écrivains bohèmes, comme Francis Scott Fitzgerald et Hemingway1. Elle note que, durant l'entre-deux-guerres en particulier, ces expatriés appartenaient pour l'essentiel aux milieux d'affaires ou aux classes fortunées, et que leur communauté se concentrait non pas autour de Montparnasse mais de l'Opéra. Par conséquent, plutôt que d'écrire une histoire culturelle des intellectuels modernistes, l'auteure aborde le parcours des Américains dans le Paris moderne à travers deux perspectives alternatives. En premier lieu, elle examine cette population du point de vue de l'histoire sociale de l'immigration. Dans quelle mesure les expatriés américains s'apparentaient-ils à d'autres communautés d'immigrants ou, au contraire, en différaient-ils? En second lieu, leur histoire s'inscrit dans celle, plus vaste, de l'expansion de la culture américaine – et plus particulièrement de son économie – au cours du xxe siècle. Tout au long de son travail, N. Green examine en quoi la vie des résidents américains dans la capitale française reflète ces thématiques plus larges.

Rares sont les chroniqueurs de l'expérience américaine à Paris à l'avoir abordée comme un type d'immigration, en raison des différences importantes qui la distinguent des modèles traditionnels. Même les Américains qui s'installèrent définitivement en France cessèrent rarement tout contact avec leur pays, conservant, de façon notoire, leur citoyenneté d'origine, et [End Page 1027] maintenant des liens étroits avec l'ambassade des États-Unis à Paris. Un monde semblait séparer les riches expatriés américains des immigrants et réfugiés démunis, en quête d'une vie meilleure en France. On ne trouve en outre aucune trace d'une «deuxième génération», de Français d'origine américaine, nés à Paris et culturellement distincts de leur parents. Fait rare dans les récits de communautés immigrantes, les enfants sont presque entièrement absents de l'histoire des Américains à Paris.

Examinant le parcours de ce groupe d'étrangers particulier, l'historienne de l'immigration qu'est N. Green s'intéresse aux réseaux de sociabilité et aux institutions. Pour une communauté comprenant seulement 40 000 individus dans les années 1920, il existait un nombre impressionnant d'organisations indépendantes ou de branches parisiennes d'institutions américaines. Plusieurs journaux américains possédaient par exemple des bureaux à Paris, où furent fondés l'American Legion et l'American Chamber of Commerce (Acc), et la ville comptait en outre deux églises et un hôpital américains, ainsi que plusieurs clubs privés, dont...

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