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Reviewed by:
  • The Huguenots of Paris and the Coming of Religious Freedom, 1685-1789 by David Garrioch
  • Nicolas Lyon-Caen
David Garrioch The Huguenots of Paris and the Coming of Religious Freedom, 1685-1789 Cambridge, Cambridge University Press, 2014, xii- 296 p.

Le dernier livre de David Garrioch constitue un travail exemplaire d'approche sociale du religieux, sur le terrain d'un xviiie siècle parisien que l'auteur connaît intimement, et ce depuis longtemps. Sa recherche s'inscrit plus précisément dans le contexte d'un intérêt renouvelé pour l'étude des relations extraconfessionnelles des minorités religieuses et, dans le même temps et plus spécifiquement, des différentes cultures de la clandestinité qui imprègnent ces dernières1. C'est bien l'alliance de ces deux approches qui fonde l'originalité de la démarche. Si les communautés protestantes d'après la révocation de l'édit de Nantes en octobre 1685, en milieu rural comme urbain, ont connu un regain d'intérêt certain depuis quelques années2, la capitale permet de conjuguer efficacement deux perspectives principales: les conditions de maintien d'une communauté calviniste hors la loi sous les yeux mêmes du monarque, d'une part, et les transformations du regard et du traitement que la société qui l'englobe exerce sur celle-ci, d'autre part.

Après 1685, la communauté protestante parisienne survit en effet, sans culte, mais sans non plus subir de persécution très violente. Ses effectifs, pour autant qu'on puisse interpréter les traces documentaires manifestant une appartenance religieuse ordinairement peu visible, ne sont pas négligeables. La communauté atteint au moins 3 000 à 5 000 personnes au milieu du xviiie siècle, contre 8 000 à 9 000 à la veille de la révocation, un chiffre qu'elle dépasse sans doute à la Révolution. Mais elle s'est en partie renouvelée: la capitale reçoit [End Page 1011] nombre de nouveaux convertis de province, surtout originaires de l'Orléanais et du Berry, qui fuient des confrontations tendues avec un clergé et des autorités qui doutent de la sincérité de leur conversion. Ce mouvement compense en partie les émigrations, surtout féminines, des protestants parisiens lors de la révocation. La composition du groupe brouille des frontières de nationalité relativement poreuses: les étrangers représentent un bon tiers des individus identifiés, originaires majoritairement de Genève et des cantons helvétiques (25 % des effectifs). Mais une part de ces derniers peuvent en fait être considérés comme des «rémigrés», descendants de familles autrefois regnicoles, comme la plupart des grands banquiers (Chabert, Tourton, Thellusson, etc.).

Signe distinctif des protestants, riches et moins riches entretiennent le plus souvent des réseaux étendus avec certaines provinces ainsi qu'avec l'ensemble de la diaspora du Refuge. Cependant, ces connexions sont exploitées avec plus ou moins d'intensité selon les possibilités financières des uns et des autres (voyager coûte cher, expédier une lettre aussi). C'est bien du reste de l'étranger que vient le salut. L'existence – en partie discontinue – de chapelles protestantes dans les ambassades étrangères (Provinces-Unies, Angleterre, Prusse) permet à de nombreux croyants (plusieurs centaines) de suivre un culte et de célébrer les baptêmes, mariages ou sépultures selon un rite protestant. Comme cela leur est en théorie interdit, beaucoup de huguenots évitent de manifester aussi ouvertement leur appartenance et maintiennent une identité religieuse essentiellement centrée sur la vie familiale, quitte à transiger sur la messe et les sacrements ou à avoir recours à de faux papiers ou à des prêtres complaisants.

Cette activité des chapelles étrangères fournit des listes nominatives précieuses établies par les chapelains ou dressées par les espions de la police parisienne. C'est également autour de ces chapelles que se structure une vie collective propre aux protestants parisiens, en particulier les réseaux d'assistance matérielle et spirituelle aux pauvres et aux mourants. Cela a ainsi pour effet de rapprocher les calvinistes des autres confessions réformées, et surtout...

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