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  • Introduction :Les classes d’accueil et d’immersion : stratégies, pratiques et croyances
  • Shelley K. Taylor and Cecelia Cutler

Dans un article publié il y a quinze ans dans cette revue, Vivian Cook (2001) affirmait qu’il était temps de remettre en question le principe bien établi selon lequel il fallait éviter d’utiliser la langue maternelle (LM) des apprenants en contexte d’apprentissage d’une langue seconde (LS) ou d’une langue étrangère (LE). Cette vision découlait d’une croyance discutable voulant que les langues soient compartimentées différemment dans le cerveau. On a longtemps cru que l’utilisation de la LM n’avait pas sa place dans les classes d’immersion ou d’accueil et que les enseignants devaient insister pour que les apprenants pensent et interagissent uniquement en langue cible (LC). Dans Linguistic Imperialism, Phillipson (1992) réfute cinq fausses croyances généralement admises dans le domaine de la linguistique appliquée, notamment celle selon laquelle une langue seconde ou étrangère doit absolument être enseignée de façon monolingue. Cette remise en question des approches pédagogiques monolingues est justement au coeur des études qui composent ce numéro spécial.

Ces approches monolingues (et possiblement soustractives) présupposent que la langue maternelle n’a aucune importance dans l’apprentissage d’une LS ou LE. À l’opposé, les approches pédagogiques additives, qui mettent à contribution la LM et s’en servent comme appui plutôt que de nier son importance, soulèvent un intérêt de plus en plus marqué, lequel se traduit par de nouveaux modèles comme le trans-apprentissage linguistique (translanguaging), défini par Otheguy, García et Reid (2015, p. 281) comme « la mobilisation du répertoire linguistique complet d’un locuteur sans égards à l’observation rigoureuse des limites des langues telles que définies d’un point de vue social ou politique » [traduction]. L’adoption d’une telle vision nécessite une réorientation des questions de recherche : il faut en effet se demander comment tirer profit au maximum du répertoire linguistique existant des apprenants. C’est justement cette réflexion qui a motivé la publication de ce numéro spécial intitulé Les classes d’accueil et d’immersion : stratégies, pratiques et croyances. [End Page 405]

Les raisons pour lesquelles de nombreux enseignants se sont fait dire d’éviter d’utiliser la LM des apprenants découlent du principe selon lequel l’apprentissage d’une LS ou LE doit se faire en contexte monolingue. L’usage de la LM doit donc être minimisé, voire interdit, de manière à reproduire le contexte d’acquisition de la LM et à maximiser les contributions en LS ou LE (Howatt, 1984). Cependant, comme le fait remarquer Cummins (2007), cette théorie repose sur peu de données empiriques. En fait, plusieurs études montrent que l’apprentissage d’une LS ou LE se fait plus rapidement et plus efficacement lorsqu’il est soutenu par la LM ; alors que d’autres établissent le transfert des compétences en LM (particulièrement les compétences en littératie) dans le processus d’apprentissage d’une LS ou LE (Cook, 1995 ; Cummins, 2000, sous presse ; Dressler & Kamil, 2006 ; Greene, 1998 ; Hall & Cook, 2012 ; Krashen, 1992 ; Rossell & Baker, 1996 ; Soto Huerta, 2012). Qui plus est, plusieurs études reconnaissent l’apport important de la LM quant au développement personnel et éducationnel global des enfants bilingues (Baker 2000 ; Cummins 2007 ; Skutnabb-Kangas, 2000).

Depuis la publication de l’article de Cook en 2001, il est de plus en plus largement admis que les méthodes d’enseignement monolingues des LS et LE doivent être remises en cause, (Piccardo, 2013), ce que fait un nombre croissant de spécialistes en enseignement-apprentissage de LS et de LE (Cenoz & Gorter, 2014 ; Conte & Meier, 2014 ; Cummins, 2007, 2009 ; García, 2009 ; García & Sylvan, 2011 ; Phillipson, 2009 ; Skutnabb-Kangas, 2009, Taylor, 2009 ; Taylor & Snoddon, 2013). Des solutions de rechange à l’enseignement monolingue sont mises de l’avant, soit le trans-apprentissage linguistique et la pédagogie translinguistique, à savoir les pratiques visant à « produire du sens, vivre des expériences, approfondir sa compréhension et ses connaissances par...

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