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Reviewed by:
  • The Courtiers’ Anatomists: Animals and Humans in Louis XIV’s Paris by Anita Guerrini
  • Pascal Duris
The Courtiers’ Anatomists: Animals and Humans in Louis XIV’s Paris. By Anita Guerrini. Chicago: University of Chicago Press, 2015. xiv + 344 pp., ill.

Le Paris et le Versailles de Louis XIV manifestent un intérêt sans précédent pour l’étude du corps animal et humain, mort ou vivant, dont la dissection devient le moyen idéal d’acquérir des connaissances nouvelles. Comme déjà au siècle précédent avec Guillaume Rondelet, Conrad Gesner, Pierre Belon ou Ulisse Aldrovandi, sur l’œuvre desquels Anita Guerrini insiste au début de son livre, cette dissection est pratiquée par des médecins et des naturalistes. William Harvey, dont Guerrini considère à juste titre que sa découverte de la circulation du sang en 1628 constitue l’événement scientifique majeur du dixseptième siècle, travaille sur des animaux qui ne sont plus seulement des objets passifs d’observations anatomiques mais deviennent des sujets actifs d’expériences. L’Académie royale des sciences de Paris, fondée en 1666, voitémerger quatre anatomistes: Claude Perrault, Marin Cureau de La Chambre, Louis Gayant et Jean Pecquet. S’appuyant sur de très nombreux documents d’archives, Guerrini détaille le programme de recherches anatomiques et physiologiques lancédès 1667 au sein de l’Académie par un Perrault jusqu’alors assez discret qui bénéficie des relations de son jeune frère Charles. Comme en témoignent ses (trop?) somptueux Mémoires pour servir à l’histoire naturelle des animaux (1671 et 1676), la compagnie dispose pour ses dissections des animaux ‘étrangers’ (lion, caméléon—Mlle de Scudéry en possède deux—, dromadaire, autruche, etc.) provenant des menageries [End Page 598] royales de Vincennes et de Versailles.À Versailles, les animaux sont d’ailleurs partout, et l’anatomie aussi travaille à la gloire de Louis le Grand. L’Académie réalise dans le même temps ses premières transfusions sanguines entre animaux, et, au contraire de la Royal Society de Londres, multiplie les dissections de corps humains. Mais, silencieuse sur la théorie cartésienne de l’animal-machine, peu soucieuse des questions de classification, il semble selon Guerrini que le modernisme de l’Académie se double d’un profond conservatisme. L’entreprise anatomique de l’Académie s’amplifie avec le recrutement vers 1674 du brillant Joseph-Guichard Duverney, figure de ‘l’anatomiste des courtisans’ selon Fontenelle (p. 166), célèbre pour sa dissection en 1681 d’une éléphanteà Versailles. L’enseignement qu’il dispense au Jardin du roi à partir de 1682 connaît un immense succès, au point qu’il apparaît dans des poèmes et des pièces de théâtre. Pareil engouement des Parisiens pour l’anatomie ne reviendra que dans les années 1740 avec Louis Daubenton, le bras droit de Georges-Louis Leclerc de Buffon, dont l’Histoire naturelle, générale et particulière, qui paraîtà partir de 1749, constitue une manière d’hommage à l’Histoire des animaux. Le livre foisonnant et agréablement illustré de Guerrini, qui choisit avec raison de ne pas inscrire son propos dans le grand récit de la révolution scientifique, redonne toute leur placeà l’œuvre anatomique et physiologique de Perrault et de Duverney, aux lieux où ils ont œuvré, ainsi qu’aux ‘petites mains’ qui les ont secondés. Il offre une image plus riche de la science moderne, dont on voit que les problématiques et la rhétorique participent à la Querelle des anciens et des modernes. Cetteétude sera désormais indispensable à qui veut connaître non seulement l’état des savoirs et la teneur des débats dans les sciences de la vie à l’âge classique, mais aussi leur place et leur fonction à la cour de Louis XIV.

Pascal Duris
Université de Bordeaux
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