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  • Vaincre la tuberculose (1879–1939). La Normandie en proie à la peste blanche by Stéphane Henry
  • Stéphane Frioux
Vaincre la tuberculose (1879–1939). La Normandie en proie à la peste blanche
Stéphane Henry
Mont-Saint-Aignan : Presses Universitaires de Rouen et du Havre, 2014, 374p., €26 (papier), €17,25 (format numérique)

La tuberculose a déjà donné lieu à une historiographie dynamique et de qualité dans les années 1980 (ouvrages de Pierre Guillaume, de Dominique Dessertine et Olivier Faure). Dans cette étude centrée sur les deux départements normands de Seine-Maritime [Seine-Inférieure à l’époque étudiée] et de l’Eure, Stéphane Henry reprend le dossier, en contribuant aux progrès de l’historiographie sur les différents aspects de l’hygiène, qui ont visé en particulier ces dernières années les instances locales comme les bureaux municipaux d’hygiène. Il bénéficie pour cela d’abondantes sources dans une région industrielle, de Rouen au Havre en passant par Elbeuf–mais aussi rurale, notamment dans l’Eure–largement touchée par ce grand « fléau social » de la France de la Troisième République. La recherche, largement appuyée sur les archives départementales et municipales, ainsi que sur des archives de l’Institut Pasteur, vise à renouveler l’étude de la lutte contre la tuberculose par un travail approfondi sur un terrain bien circonscrit, ce qui permet de s’intéresser finement aux processus politiques et aux questions démographiques posées par les sources médicales conservées. L’auteur parvient à restituer la complexité d’un mouvement antituberculeux [End Page 246] parfois bien différent des images idylliques que la propagande de l’entre-deux-guerres s’est évertuée à dessiner. Il cherche à démystifier les rapports entre un pouvoir central qui légifère et des collectivités qui adaptent à leur façon les directives nationales, et à montrer qu’il n’y a pas « une lutte contre la tuberculose mais des luttes contre la tuberculose à de multiples échelles » (291).

Après un premier chapitre rappelant quelques données fondamentales de l’histoire de la tuberculose au 19e siècle, l’auteur aborde le sujet par l’hôpital, lieu central des pratiques de santé, où viennent mourir une partie des phtisiques de Normandie, et que l’on essaye de réformer pour éviter la contamination des autres patients. Comme dans d’autres régions françaises, les efforts sont multiples, parfois concurrents, et ne sont guère coordonnés avant la Première Guerre mondiale. Le chapitre 3 est organisé autour de ce moment particulier, qui lance véritablement en France la bataille contre la tuberculose, en lui faisant dépasser le stade des initiatives privées isolées. Il faut gérer l’afflux de soldats réformés dans les hôpitaux urbains, comme au Havre, et créer un service propre pour les isoler. L’année 1916 constitue ainsi une césure après laquelle une deuxième partie va présenter la prise en charge de la lutte antituberculeuse par les pouvoirs publics (ainsi que la célèbre Mission Rockefeller), détaillée chapitre 4. Les chapitres 5 et 6 mettent en opposition les deux départements de l’enquête. D’abord, la Seine-Inférieure, département qui s’investit fortement dans le combat contre le fléau, sous la houlette d’un préfet volontariste, Charles Lallemand, en développant les dispensaires, structures locales du dépistage et de l’orientation des malades. Ensuite l’Eure, plus rurale, qui bascule plus tard « de l’attentisme aux réalisations », grâce à un médecin-hygiéniste déterminé, le docteur Lièvre-Brizard. Celui-ci passe dix années à la tête de l’inspection départementale d’hygiène, non sans affronter des oppositions médicales et politiques.

Une troisième partie intitulée « protéger, isoler, vacciner » est consacrée à la prophylaxie de la maladie et à ses publics. Le chapitre 7 traite des sanatoriums normands : on y retrouve les différences entre les deux départements. Stéphane Henry met en lumière...

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