- Petitioning for Our Rights, Fighting for Our Nation. The History of the Democratic Union of Cameroonian Women, 1949-1960 by Meredith Terretta
Cet ouvrage est un récit historique captivant des contributions de l’Union démocratique des femmes camerounaises (UDEFEC) à la lutte contre le colonialisme français au Cameroun. Ce travail de qualité remarquable et tant attendu conduit par Meredith Terretta, professeure associée d’histoire à l’Université d’Ottawa au Canada, est la première étude entièrement consacrée à documenter la participation des femmes dans une des luttes anticoloniales africaines les plus prometteuses portées par le tout jeune mouvement nationaliste de l’Union des populations du Cameroun (UPC).
En six chapitres, Terretta mène à bien la tâche qu’elle s’est fixée : historiciser le rôle fondamental joué par l’UDEFEC au sein du mouvement d’indépendance de l’UPC en analysant « les pétitions envoyées aux Nations Unies (ONU) par les femmes nationalistes pendant les années 1950 » pour démontrer « comment l’activisme politique et social des femmes de l’UDEFEC contribua à remodeler la conscience collective » (p. 5). Pour atteindre cet objectif, elle exploite les pétitions du Conseil de tutelle, les dossiers de l’UPC aux Archives nationales, des entretiens avec des informateurs ainsi que les tracts et livrets publiés par les dirigeants exilés de l’UPC. En analysant la manière dont furent recueillies les pétitions de l’UDEFEC, Terretta pose la pétition comme une action vectrice de participation populaire et explique que « les pétitions de sens collectif ont plus de poids qu’une pétition individuelle » (p. 21).
Petitioning for our Rights se divise en trois phases : la première concerne la période précédant 1954, lorsque les dirigeants des mouvements nationalistes commencèrent à faire valoir leurs droits pour appeler à un vaste mouvement international pour les droits de l’homme et l’autodétermination. La deuxième phase couvre les années 1954-1956, période marquée par des tensions croissantes entre les mouvements nationalistes et l’autorité française. Les pétitions lancées au cours de cette deuxième phase venaient en réaction aux mesures répressives mises en place par l’État colonial français et tendaient à souligner les disparités entre la mission de l’ONU consistant à créer des territoires sous tutelle et les politiques répressives arbitraires de l’administration française. Le livre rapporte enfin en détail les développements politiques d’après 1956, lorsque les administrateurs de l’ONU dans le Cameroun britannique et le Cameroun français mirent en place des mesures plus strictes afin d’anéantir l’UPC. Les causes de la résistance et du rejet du régime colonial, à travers des pétitions et d’autres actions de protestation, sont soulignées tout au long du livre.
Celui-ci se développe à partir de plusieurs thèmes imbriqués, dont trois permettent d’éclairer l’idée directrice de son interprétation de l’UDEFEC et de rendre compte de son rôle : sa structure organisationnelle (pyramidale), l’accent mis sur l’éducation (connaissance des droits et apprentissage de la tenue de registre) et son dévouement (persistance et persévérance). Ces thèmes, qui caractérisèrent la nature de l’UPC, firent de l’UDEFEC un formidable adversaire que l’autorité coloniale française ne pouvait maîtriser et la menèrent finalement à user d’une violence sévère lorsqu’elle tenta d’étouffer le mouvement, un peu comme le firent les Anglais au Kenya contre les Mau Mau5.
L’autonomie de l’UDEFEC, rendue possible grâce à Ruben Um Nyobé, est démontrée de façon admirable. Um Nyobé, le dirigeant de l’UPC, joue un rôle [End Page 166] important dans ce livre. Il est reconnu comme le fondateur de l’UDEFEC, celui qui a insufflé son indépendance d’action à la lutte...