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Reviewed by:
  • La Première Guerre mondiale ed. by Jay Winter
  • Frédéric Rousseau
Jay Winter (dir.) La Première Guerre mondiale, vol. 1, Annette Becker (coord.), Combats Paris, Fayard, 2013, 847 p. et 40 p. de pl.

Dix ans après l’Encyclopédie de la Grande Guerre1, la dynamique équipe d’historiens rassemblés autour du Centre international de recherches de l’Historial de la Grande Guerre (Cirhgg) de Péronne livre son nouvel opus collectif publié conjointement avec Cambridge University Press2. Cette somme impressionnante et utile, en ce qu’elle facilite l’accès à des données de tous ordres souvent très dispersées, réunit de nombreux spécialistes internationaux – même si l’on doit relever un fort tropisme occidental (aucun historien russe; le seul historien allemand est confiné au « déclenchement »). Le titre de l’avant-propos commun aux trois volumes a le don de capter l’attention du lecteur spécialiste ou simplement passionné par cette période: « L’histoire [End Page 261] de la Première Guerre mondiale: le moment transnational », aussi est-ce à l’aune de cette ambition prometteuse qu’est effectuée cette recension du volume 1.

À l’instar des deux autres volumes, Combats est organisé en trois parties principales. Outre les nombreuses notes renvoyées en fin d’ouvrage (moins celles du chapitre 4, qui ont visiblement disparu à l’impression), les auteurs ont généralement constitué des « essais bibliographiques » fort bienvenus, même si l’on peut regretter, là encore, qu’ils soient trop centrés sur les productions françaises et britanniques. L’historiographie italienne, notamment, est la grande sacrifiée, si l’on excepte le chapitre consacré au « front italo-autrichien » où se trouve confiné le seul historien transalpin invité à se joindre au projet.

L’entrée en matière diplomatico-militaire ne déroutera pas le lecteur. La rivalité navale anglo-allemande et la course aux armements terrestres sont conçues comme autant de préparatifs menant tout droit vers l’explosion en chaîne de 1914. La Russie et l’empire ottoman restent toutefois largement hors champ de ces préliminaires, immédiatement suivis par la narration du « déclenchement ». Après une courte introduction historiographique qui rappelle utilement les débats et les enjeux successivement déployés depuis un siècle autour de la question des responsabilités, ce second chapitre revient en détail sur l’attentat de Sarajevo, levé au rang de « prétexte rêvé » (p. 55) devant permettre à l’Autriche-Hongrie de régler, enfin, son compte à la Serbie. Conforme à la carte des grands systèmes d’alliances des manuels du secondaire, l’examen successif des calculs plus ou moins hasardeux des Allemands, puis des Autrichiens, précède l’évocation des positions russe et française, et semble tenir pour acquise la responsabilité de la Russie dans la grande conflagration.

Au total, rien de bien nouveau dans ce tableau fidèle au schéma habituel – et quelque peu téléologique – du mécanisme irréversible des alliances, qui désigne les grands chefs militaires comme les principaux responsables du basculement des pouvoirs civils dans la guerre. Ce choix narratif appelle deux remarques. Tout récit des origines tend à produire un enchaînement causal quasi mécanique, et ce, bien que les auteurs affirment que la guerre « n’était pas inévitable » (p. 77). Précisément, pour pouvoir imaginer cette « évitabilité », il aurait été utile d’élargir la focale et d’exposer les relations et les circulations, les pratiques, les systèmes de représentation et les capitaux partagés – symboliques, sociaux, culturels ou financiers – qui, avant la guerre pourtant, rapprochaient et liaient plus ou moins étroitement – au point que d’aucuns ont pu parler de première mondialisation – des franges non négligeables des différentes élites nationales, qu’elles soient politiques, militaires, religieuses, culturelles ou économiques.

Plus généralement, et en dépit des efforts déployés par les auteurs pour relever un tel défi, l’intérêt du parti pris d’un séquençage annuel rend quelque peu perplexe. Les titres des chapitres...

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