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  • An Age of Neutrals: Great Power Politics, 1815-1914 by Maartje Abbenhuis
  • Éric Schnakenbourg
Maartje Abbenhuis An Age of Neutrals: Great Power Politics, 1815-1914 Cambridge, Cambridge University Press, 2014, x- 289 p.

« L’analyse de la neutralité est un baromètre utile de la flexibilité et de la nature du système international » (p. 236). Cette phrase résume bien la perspective choisie par Maartje Abbenhuis pour son étude sur la neutralité. L’auteure, qui a déjà publié un ouvrage sur les Pays-Bas pendant la Première Guerre mondiale1, se concentre, cette fois, sur le xixe siècle, plus particulièrement sur la période allant du congrès de Paris de 1856 à la déclaration de guerre de 1914. M. Abbenhuis qualifie, à juste titre, cette période d’« age of neutrals », tant il est vrai que les neutres et la notion de neutralité jouent un rôle essentiel dans le système international. En effet, celle-ci est louée et promue par les petites comme par les grandes puissances, tout en étant un objet de réflexion pour les juristes internationalistes.

Si un certain nombre de principes, de pratiques et de coutumes de la neutralité se sont mis en place depuis le xviie siècle, il faut attendre le congrès de Paris pour que des règles communes encadrant le commerce des pays neutres en temps de guerre soient adoptées par les grandes puissances. Les nombreux conflits du xixe siècle permettent aux pays européens de faire l’expérience, plus ou moins durable, de la neutralité, avec laquelle tous les États n’ont pas le même rapport, comme M. Abbenhuis le souligne avec raison. Pour certains neutres permanents, ou à long terme, elle est une posture et le pivot de leur politique étrangère. Les neutres occasionnels ou non naturels (unnatural neutrals), quant à eux, se tiennent à l’écart d’une guerre parce qu’ils n’y trouvent aucun intérêt immédiat et que l’absention leur procure, tout au contraire, certains avantages. Au long du xixe siècle, ces pays sont dans une position duale qui les conduit parfois à revendiquer les droits de la neutralité, parfois à les violer lorsqu’ils sont belligérants.

M. Abbenhuis montre qu’au fil du siècle, et malgré des situations fort différentes, les États, lorsqu’ils sont neutres, sont confrontés aux mêmes types de difficultés, doivent observer les mêmes devoirs et doivent bénéficier des mêmes droits. Cela explique le besoin croissant de définition et de codification des règles de la neutralité, qui se manifeste dans la seconde moitié du siècle. La neutralité, produit du système international, évolue en fonction des paramètres qui le fondent, des évolutions des rapports de force, des progrès de la technologie militaire, des modifications du droit international et de la culture de la paix.

Au xixe siècle, la neutralité participe à la stabilisation du système international par le biais du Concert européen. Les pratiques de neutralisation sont intégrées à l’équilibre des forces sur le continent, car elles permettent [End Page 242] d’extraire certains territoires de la compétition internationale pour réduire les causes de tension, tout en créant des zones tampons entre les grandes puissances. C’est le cas notamment de la mer Noire, de la Suisse, de la Belgique, voire du Congo, dont la neutralisation est garantie par un engagement solennel des grandes puissances. Ce type de pratiques manifeste la volonté de maintenir un statu quo international devant permettre d’éviter les conflits. La guerre de Crimée, en particulier, est une période importante dans l’histoire des droits des neutres. La volonté franco-britannique de ne pas provoquer une guerre générale explique les concessions des belligérants aux neutres, ce qui fait écrire à M. Abbenhuis que « la guerre de Crimée était à bien des égards une guerre de la neutralité » (p. 74).

Plus globalement, l’extension des droits de la neutralité s’explique par la volonté britannique de maintenir la paix ou, du moins, de...

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