In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • L’armée d’Italie. Des missionnaires armés à la naissance de la guerre napoléonienne by Gilles Candela
  • Valéria Pansini
Gilles Candela L’armée d’Italie. Des missionnaires armés à la naissance de la guerre napoléonienne Rennes, Pur, 2011, 402 p. et 6 p. de pl.

Parmi les mythes qui ponctuent l’histoire de France, l’armée d’Italie occupe une place particulière: elle réunit dans un même tableau le peuple combattant contre l’étendard sanglant de la tyrannie et le héros qui le conduit, les idéaux de la Révolution et la gloire de la victoire. L’armée jacobine serait pauvre et constamment en sous-effectif par rapport à l’ennemi, mais victorieuse parce qu’héroïque et conduite par le plus talentueux des généraux. Gilles Candela affronte les multiples facettes de cette image mythique et en déconstruit plus d’une: grâce à un système logistique léger (qui exploitait largement les ressources du pays traversé), l’armée d’Italie était loin d’être dépourvue de moyens, d’armement et de biens de subsistance; pendant la campagne de 1796-1797 elle n’a jamais combattu en situation de sous-effectif significatif. La construction consciente et voulue du mythe commence quand l’armée d’Italie est encore opérationnelle et, telle une toile de fond de l’épisode du pont d’Arcole, sert la légende de Bonaparte meneur d’hommes charismatique, en même temps soldat courageux et génie de la guerre.

L’objectif de l’ouvrage de G. Candela, issu de sa thèse de doctorat, n’est pourtant pas la déconstruction des mythes, mais la réalisation d’un ouvrage de référence, « un beau travail d’histoire totale », comme le dit Francis Pomponi dans la préface (p. 10), extrêmement riche en informations, qui réunit les deux périodes de l’armée d’Italie, de la longue présence dans les Alpes-Maritimes à la campagne sous les ordres de Bonaparte.

La recherche s’appuie sur une abondante documentation, issue surtout des fonds du Service historique de la Défense, dont l’auteur décrit les typologies et met en évidence les manques, en gardant un lien constant entre ses affirmations et les sources qui les permettent. Ce lien constitue le fondement du travail de l’historien, mais on a parfois l’impression que la volonté de fidélité au document empêche G. Candela d’aller plus loin dans l’interprétation et dans la prise de position sur les questions historiographiques pour lesquelles l’armée d’Italie est un objet d’étude privilégié.

Pratiquement toutes les thématiques dont l’étude a renouvelé l’histoire militaire sont touchées: la violence, l’histoire des techniques, la relation entre le politique et le militaire, [End Page 238] l’histoire sociale de l’armée. L’auteur s’intéresse à la violence perpétrée par les soldats français sur les populations civiles pendant les longs mois de séjour dans les Alpes-Maritimes. Il met en relation les nombreux épisodes dont les sources font mention et l’absence d’une réelle justice militaire dans les premiers temps du conflit, qui aurait créé un sentiment d’impunité parmi les soldats. La relation est également établie entre les actes de violence récurrents et la rareté relative d’affrontements ouverts entre armées. En outre, la « petite guerre », les embuscades, les actes de harcèlement perpétrés par l’ennemi et auxquels les populations civiles étaient parfois associées – et toujours suspectées de l’être – auraient créé un climat d’incertitude et une difficulté à identifier l’ennemi favorables aux actes de violence dont les soldats de l’armée d’Italie se rendaient responsables.

À plusieurs reprises G. Candela revient sur l’importance de la « petite guerre » pour l’armée d’Italie, y compris du point de vue des techniques. Confrontée aux offensives dans les Alpes-Maritimes, subissant les attaques des miliciens sardes habitués à la guerre de montagne, l’armée d’Italie...

pdf

Share