Propaganda e información en tiempos de guerra. España y América, 1700-1714 by David González Cruz (review)

Comme le titre l’indique, cet ouvrage de David González Cruz analyse la propagande et la circulation de l’information au temps de la guerre de Succession d’Espagne. L’auteur étudie l’ensemble des écrits émanant des partis des deux prétendants au trône, l’archiduc Charles de Habsbourg et Philippe V de Bourbon. Loin de limiter sa recherche à la péninsule Ibérique, il élargit le cadre géographique à l’empire espagnol des Amériques. D. González Cruz poursuit ainsi sa réflexion sur les discours en temps de guerre, dont il s’était jusque-là attaché à analyser la dimension religieuse¹. Son objectif est de « mettre en relief les mécanismes et les processus sociaux de communication utilisés par le pouvoir pour persuader, convaincre, manipuler et s’attirer les volontés autour de buts politiques et militaires dans une double direction, la population civile d’un côté et les forces armées de l’autre » (p. 12).

L’enquête de D. González Cruz se caractérise par la prise en compte de la dimension impériale de la propagande, ainsi que par l’attention accordée à la matérialité des textes et aux aspects les plus concrets de leur diffusion. Elle repose sur un socle documentaire considérable. Un tel parti pris se traduit par le nombre important de centres d’archives visités aussi bien en Espagne qu’en Amérique hispanophone (Argentine, Chili, Mexique, etc.) et il est heureux pour le lecteur que l’auteur consacre le premier chapitre à l’exposition de ses sources. D. González Cruz présente donc successivement les instruments de la propagande officielle (manifestes, proclamations, lettres circulaires, édits, etc.), ceux de la propagande religieuse des clercs qui relaie parfois, mais pas systématiquement, le pouvoir en place, les documents qui livrent une version officielle des faits (relaciones de sucesos, mémoires, gazettes), les correspondances, les livres, les libelles (satires, pasquins, etc.), la parole, les images, le théâtre et les monnaies et médailles, ce qui lui permet de détailler une typologie des modalités de propagande.

Les citations sont nombreuses, riches et toujours bienvenues, illustrant le propos ou participant pleinement à la démonstration. Les cinq autres chapitres abordent un thème en rapport avec la propagande qui prend parfois la forme d’un problème ou bien développent des questions liées aux processus concrets de circulation des discours de guerre.

Le premier thème traité est celui de l’image royale dans la propagande. L’auteur démontre l’importance de la présence de Philippe V et de l’archiduc Charles sur le théâtre des opérations militaires et la façon dont celle-ci est relayée à travers l’exaltation de qualités guerrières qui convertissent le souverain en héros et en protecteur de ses sujets. Le roi joue ainsi un rôle fédérateur de premier ordre, dissuadant les désertions, galvanisant les soldats, transcendant les diverses nationalités des combattants (Aragonais, Castillans, etc.).

Le second thème est celui de la vérité des discours qui circulent dans un contexte belliqueux. L’auteur réfléchit essentiellement aux diverses modalités du mensonge comme arme de guerre: la calomnie, la présentation biaisée des faits, qui transforme des défaites en victoires, ou encore la retouche de certains épisodes pour accentuer le sentiment de triomphe dans son propre camp et de déroute chez l’adversaire, dont la mort de l’archiduc Charles en Autriche et la fuite de Philippe V en France, abandonnant ainsi ses sujets, sont les deux exemples les plus frappants de la période.

Le dernier thème est celui de la sortie de guerre à travers une analyse des discours de pardon, de châtiment et de récompense. La guerre ouvre à certains des perspectives...