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Reviewed by:
  • L’abbé Pierre Gravel : Syndicaliste et ultranationaliste by Alexandre Dumas
  • Hugues Théorêt
Alexandre Dumas, L’abbé Pierre Gravel: Syndicaliste et ultranationaliste, Québec: les Éditions du Septentrion, 2014.

Lionel Groulx est certainement l’ecclésiastique qui a exercé la plus grande influence sur l’élite nationaliste canadienne-française du xxe siècle. Mais il n’est pas le seul. D’autres comme lui ont prêché un nationalisme axé sur la défense des valeurs traditionnelles canadiennesfrançaises dont la langue française, la famille, la terre et la religion catholique. C’est le cas de l’abbé Pierre Gravel, un prêtre réactionnaire, ultranationaliste, anticommuniste et profasciste que l’historien Alexandre Dumas nous dépeint dans ce livre qui comble un vide historiographique.

Sans aller jusqu’à le comparer à Lionel Groulx, l’auteur démontre que Pierre Gravel a eu une influence considérable auprès de ses contemporains. Contrairement à Groulx, Gravel a laissé peu d’écrits. L’essentiel de son œuvre provient des conférences qu’il a prononcées aux quatre coins du Québec essentiellement pendant les décennies 1930 et 1940. Comme Groulx, Gravel se préoccupe de la survivance de la langue française et de la religion catholique. Tous deux combattent les excès du capitalisme, l’infiltration communiste, la démocratie parlementaire et le régime des partis. Malgré les ressemblances entre les deux hommes d’Église, l’auteur démontre que le discours de Gravel, à l’instar de sa vie, se distingue de celui du chanoine Groulx. Il y arrive très bien en présentant en un peu plus de 300 pages le portrait d’un ecclésiastique qui, à première vue, paraît rempli de contradictions. Comment peuton être à la fois syndicaliste et fasciste, défendre les travailleurs des mines tout en appuyant le gouvernement de Maurice Duplessis ? Loin d’être contradictoire, croit l’auteur, le discours national et le discours social de Gravel se complètent parfaitement.

Dumas pose les limites de son ouvrage. Son mémoire de maîtrise, qui est à la base du livre, ne lui permettait pas de réaliser une biographie exhaustive, reconnaîtil d’emblée. L’oeuvre se divise en trois chapitres : le récit de la vie de Gravel, son discours national et son discours social. Nommé vicaire à Thetford Mines en 1924, l’abbé Gravel commence à exercer ses talents d’orateur. En 1925, il invite la population à travailler à la construction d’un État français indépendant. Il défend [End Page 267] les travailleurs et dénonce les gérants des mines. Au cours de la campagne électorale de 1935, Gravel prend position contre le Parti libéral de Louis-Alexandre Taschereau. Cet affront lui vaut d’être rappelé à Québec pour agir comme vicaire à l’église de Saint-Roch. C’est à cette époque que l’abbé Gravel se fait connaître à travers le Québec. Gravel côtoie René Chaloult, Ernest Grégoire, Philippe Hamel et Paul Bouchard qui, comme lui, voient dans les programmes des dictateurs européens des solutions aux problèmes de l’heure.

Dumas soutient que Gravel est bien plus inspiré par les États autoritaires (Franco, Salazar et Pétain) que par les États totalitaires (Hitler et Mussolini). Pourtant, Gravel ne se gêne pas pour faire le salut fasciste dans des assemblées publiques comme lors de la Saint-Jean-Baptiste au parc Durocher à Québec en 1937. Cependant, Gravel n’aurait pas frayé avec les fascistes d’Adrien Arcand. Comme le souligne Dumas, « comment ce prêtre, qui est un indépendantiste de la première heure et a fait un appel textuel à la révolution nationale, auraitil pu s’associer avec un parti fédéraliste anglophile ? » Comme les fascistes, précise Dumas, Gravel est à la recherche d’une troisième voie qu’il trouve dans le corporatisme, une solution aux maux du capitalisme et à la menace du communisme (196). Mais quelle forme de corporatisme ? Le corporatisme social de l’Église catholique ou le corporatisme d’État qui se rapproche du fascisme italien ? D’une part, écrit Dumas, l’abbé Gravel présente « le...

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