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Reviewed by:
  • Sleepwalking into a New World: The Emergence of Italian City Communes in the Twelfth Century by Chris Wickham
  • Giuliano Milani
Chris Wickham Sleepwalking into a New World: The Emergence of Italian City Communes in the Twelfth Century Princeton, Princeton University Press, 2015, xi-305 p.

Au cours du dernier quart du xxe siècle, la découverte de nouvelles données et l’affirmation de nouvelles perspectives interprétatives ont définitivement remis en cause l’idée que les communes italiennes du Moyen Âge étaient le résultat de l’action menée contre le monde féodal par des bourgeois s’appuyant sur la croissance économique. La fin de ce paradigme a suscité de vastes discussions portant en particulier sur l’identité sociale du personnel politique de la commune dans la première phase de son histoire : avait-il des points communs avec les aristocraties du reste de l’Europe (par exemple les liens féodaux soulignés par Hagen Keller1) ou possédait-il au contraire des caractéristiques propres ?

Dans un ouvrage qui a fait date, Jean-Claude Maire Vigueur a fait avancer ce débat souvent très animé en montrant que le personnel dirigeant de la commune consulaire se recrutait [End Page 1008] essentiellement dans une large classe de milites urbains (environ 10 % de la population), d’accès très ouvert dans la mesure où, loin d’être sélectionnée par le haut, elle était formée de tous ceux qui avaient les ressources pour combattre à cheval2. Il a ainsi jeté un nouvel éclairage sur les gouvernements communaux du xiie siècle et a permis, entre autres choses, de rendre compatible la nouveauté des systèmes politiques des villes italiennes avec l’appartenance de leurs dirigeants à la plus haute strate de la société.

Cherchant à approfondir et parfois à préciser cette lecture, Chris Wickham apporte aujourd’hui une contribution importante au thème des racines sociales des communes. La différence de ce livre par rapport à ceux, entre autres, des auteurs précités tient aux questions posées plus encore qu’aux réponses apportées. Si, chez les premiers, la question était avant tout de comprendre l’identité et la reproduction d’un groupe social (ce qui conduisait les auteurs à centrer l’analyse sur la seconde moitié du xiie siècle, avec d’importantes incursions au xiiie), ici le propos est avant tout d’expliquer de quelle manière a pu se produire la transformation politique qui, dans la première moitié du xiie siècle, conduisit de l’ordre royal d’origine carolingienne au nouveau monde des pouvoirs communaux. L’analyse des groupes responsables de cette transformation, quoique très présente, se plie à cette exigence.

Les lecteurs des précédents ouvrages de l’auteur – en particulier Courts and Conflict3 dont ce livre est en quelque manière un développement – ne s’étonneront pas de la méthode mise en œuvre, même dans un texte né sous forme de conférences. Dans les trois chapitres centraux, C. Wickham étudie l’émergence de la commune en examinant la totalité de la documentation disponible – chartes et chroniques – pour trois villes : Milan, Pise et Rome. Pour ce faire, il procède d’abord à une reconstruction des événements visant à saisir aussi précisément que possible la chronologie de ce qu’il appelle la « cristallisation » des institutions communales; il passe ensuite à un examen serré d’un certain nombre de familles impliquées dans ce processus.

L’étude de ces trois cas est précédée par un chapitre introductif qui se compose de brèves réflexions historiographiques et propose, surtout, une liste des caractéristiques permettant d’identifier une commune : la présence d’une collectivité souvent unie par un serment, de magistrats qui se relaient à la tête de l’institution, d’une autonomie de facto sinon reconnue dans l’exercice de la justice, l’activité législative, la fiscalité, la guerre. Le chapitre final applique les résultats des trois analyses les plus approfondies aux autres villes italiennes, à l’aide de la bibliographie disponible (mais...

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