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Reviewed by:
  • The Voice of the Citizen Consumer: A History of Market Research, Consumer Movements, and the Political Public Sphere ed. by Kerstin Brückweh
  • Marion Fontaine
Kerstin Brückweh (éd.) The Voice of the Citizen Consumer: A History of Market Research, Consumer Movements, and the Political Public Sphere Oxford, The German Historical Institute London/Oxford University Press, 2011, 304 p.

L’histoire de la consommation et des consommateurs a fait l’objet à la fois d’un renouvellement et de développements croissants durant ces dernières décennies1. C’est dans ce cadre que se place cet ouvrage qui repose sur un projet à la fois clair et ambitieux, explicité par Kerstin Brückweh dans son introduction: l’enjeu est de connecter les nouvelles formes de l’histoire politique et celles de l’histoire de la consommation autour de l’analyse de la figure du citoyen-consommateur. Il s’agit d’envisager les formes évolutives de cette nouvelle catégorie et ses implications, au-delà des grandes proclamations théoriques affirmant, sur le mode du «ceci tuera cela», que l’envahissement de la sphère publique par la consommation de masse ne peut avoir pour seul résultat que la dévitalisation et la dépolitisation.

Cette entreprise a pour premier mérite de dépasser des historiographies demeurées jusque très récemment ancrées dans des contextes nationaux, afin d’adopter une perspective pleinement internationale et, à certains égards, transnationale. Ce sont surtout les situations de la France, de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne qui sont envisagées, avec un certain [End Page 264] nombre d’incursions vers les États-Unis, même si les études nationales sont ouvertes à la comparaison entre les historiographies des différents pays ou entre situations historiques (dans une perspective centrée essentiellement sur le xxe siècle, l’ère de la consommation de masse; toutefois certaines analyses remontent un peu plus loin dans le temps). L’ensemble voit alterner des études de cas (les enquêtes d’opinion du magazine Elle envisagées par Judith Coffin, le rapport à l’État des organisations françaises de consommateurs tel qu’il est présenté par Alain Chatriot) et des articles à visée plus générale (ainsi celui de Matthew Hilton revenant sur l’activisme des consommateurs et son évolution sur la période contemporaine).

Le livre emprunte sur cette base trois perspectives successives. La première partie touche aux liens noués entre les modes d’observation et de représentation des consommateurs avec ceux des citoyens, notamment sous l’aspect des sondages et des enquêtes d’opinion. L’édification de nouveaux modes d’expertise, et la naissance de nouveaux experts, comme l’apparition de nouvelles modalités de représentation se développent sur fond d’échanges croisés entre le champ politique et celui de la consommation, par exemple à travers le cas britannique ou celui de l’Allemagne de l’Ouest à partir de 1945 (Norbert Grube). J. Coffin montre nettement pour sa part que les enquêtes commandées par Elle dans les années 1960 sont loin d’être une simple technique de marketing; elles participent au contraire directement à la définition/à l’invention d’un nouveau groupe social et politique, celui des «femmes modernes». La partie suivante concerne l’intervention directe des consommateurs dans la sphère publique, notamment par le biais des organisations de consommateurs ou par la prise en compte de la consommation et des organisations de consommateurs dans les projets politiques, ainsi pour le leader travailliste modernisateur Anthony Crosland décrit par Lawrence Black. La dernière partie vise à démontrer que les questions de consommation peuvent, de façon globale, être envisagées et saisies comme des enjeux politiques ou des moyens de redéfinition des normes et des politiques publiques, ainsi pour celles qui entourent la protection des données ou l’identification des citoyens-consommateurs.

Ces divers modes d’entrée ouvrent des pistes de réflexion nombreuses, même si certains articles prennent parfois un tour très abstrait (par exemple celui de Rainer Gries sur les rapports entre sens culturel des produits marchands et culture politique...

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