In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Rémunérer le travail au Moyen Âge. Pour une histoire sociale du salariat dir. by Patrice Beck, Philippe Bernardi et Laurent Feller
  • Corine Maitte
Patrice Beck, Philippe Bernardi et Laurent Feller (dir.) Rémunérer le travail au Moyen Âge. Pour une histoire sociale du salariat Paris, Picard, 2014, 527 p.

L’histoire sociale du salariat a repris une nouvelle vigueur depuis la parution du livre de Robert Castel Les métamorphoses de la question sociale1. C’est précisément à un nouvel examen des pratiques sociales liées à la rémunération du travail dans le temps long du Moyen Âge européen que s’attelle ce livre. Retourner au plus près des sources, les réinterroger d’un œil critique pour saisir de la façon la plus fine et la plus individualisée possible ce que rémunérer veut dire, voilà le défi que se sont donné plus d’une vingtaine d’historiens, un économiste et un juriste, réunis dans cette aventure qui aura duré plus que le temps du programme Anr (2006-2008) lui ayant permis de voir le jour.

Quatre grands thèmes ont structuré les discussions et se retrouvent dans l’ouvrage: après un regard critique sur l’historiographie (première partie), le retour aux sources se révèle urgent. L’examen commence par une approche fine des termes utilisés pour désigner la rémunération (deuxième partie), puis se porte sur les modes de rémunération du travail, les formes de l’embauche et la composition du paiement (troisième partie), avant de se poursuivre par l’analyse des formes du paiement et l’évaluation des rémunérations (quatrième partie).

Au-delà des apports spécifiques de chaque article, il est appréciable que chaque partie soit précédée d’une introduction qui tire les fils des cas précisément analysés. En outre, les articles consacrés à l’historiographie sont tous suivis d’une liste de références spécifiques qui précise la bibliographie générale. La cohérence de l’ensemble est renforcée par la participation de certains des auteurs à chacune des grandes parties de l’ouvrage. On sait également gré aux initiateurs de l’entreprise d’avoir tenu à prendre en compte un vaste domaine géographique (outre la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, l’Allemagne, l’Angleterre – même si ce pays n’est en fait pas présent dans les études de cas) et un temps très long: du haut Moyen Âge jusqu’au tout début du xvie siècle. Cela dit, la documentation est manifestement bien plus abondante après 1348, signe des mobilités croissantes et de la nécessité d’une formalisation accrue des relations de travail (Francine Michaud). L’index, les bibliographies et les documents publiés font également de cet ouvrage un «outil de travail» très utile. La conclusion de Monique Bourin, en forme de bilan et de compte rendu du livre, pose la question essentielle et récurrente: «Le salariat existe-t-il au Moyen Âge?»

Si les contributeurs sont nombreux, aucun spécialiste de la pensée scolastique n’a participé à l’aventure, une absence que regrettent à juste titre les porteurs du projet. Ils n’ont pas non plus réussi à mobiliser de ruralistes (à la notable exception de Pere Benito), autre manque criant auquel il est malheureusement de plus en plus fréquent de se heurter. Les secteurs concernés par les études de cas sont donc presque tous urbains – à l’exception des mines d’alun de Monterotondo en Toscane étudiées par Didier Boisseuil et Pascal Chareille – et très nettement marqués par la prédominance des sources comptables dans les secteurs du textile et, plus encore, du bâtiment. Malgré tout, la variété des sources, comptables donc, mais aussi notariées, judiciaires, fiscales, réglementaires, est remarquable, tout comme la présence de secteurs tels que la construction navale et la navigation (Roser Salicrú), le mercenariat (Armand Jamme note justement que c’est l’une des plus grandes...

pdf

Share