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Reviewed by:
  • Les femmes en politiques changent-elles le monde? by Pascale Navarro
  • Liliana Rizzuto
Pascale Navarro, Les femmes en politiques changent-elles le monde?, Montréal, Boréal, 2010, 136 p., 17,95$

La journaliste et chroniqueuse Pascale Navarro publie un essai dont le titre interrogateur, Les femmes en politique changent-elles le monde?, se donne d’emblée comme une boutade tant la réponse semble relever de l’évidence. Alors que de plus en plus de femmes occupent des postes de pouvoir au sein des partis, ministères et gouvernements, Navarro se demande pourquoi nous, Québécois et Québécoises, sommes si enclins à favoriser une plus grande représentation des femmes dans les parlements? Pourquoi encourager les femmes, pourtant souvent épouses et mères de famille, à embrasser la carrière de politicienne? Que font-elles que les hommes ne font pas ou ne pourraient faire seuls? Ces questions, d’une simplicité heureusement fort trompeuse, sont pour l’essayiste à l’origine d’une réflexion menée d’avril 2004 à septembre 2010 au cours de laquelle elle interviewe plus d’une vingtaine de politiciennes et de citoyennes engagées. Le témoignage de ces femmes colore et nuance le propos de l’auteure sans toutefois s’y substituer et c’est bien la voix de Navarro qui s’impose finalement afin de proclamer la nécessité de quotas de type législatif, et non plus seulement volontaires, exigeant la parité numérique des hommes et des femmes au sein des gouvernements. C’est la thèse défendue, répétée comme un leitmotiv dans l’ensemble du livre, que le pouvoir des femmes est dans leur nombre : « collectivement, les femmes changent la politique et le monde dans lequel on vit, mais […], individuellement, elles ne possèdent pas de pouvoir magique ».

Féministe, et même postféministe de son propre aveu, Navarro commence son essai par une brève introduction dans laquelle elle annonce et explicite son biais idéologique. De son point de vue, il est primordial d’abord de « désexuer les valeurs ». S’il est vrai que les femmes assument un rôle social sexué qui s’accompagne d’un certain nombre de responsabilités et de préoccupations particulières, ces dernières ne les définissent pas de manière absolue et, surtout, elles n’en possèdent pas le monopole. Les exemples de femmes autoritaires et d’hommes empathiques ne [End Page 427] manquent pas dans l’histoire contemporaine. De Margaret Thatcher à Barack Obama, on serait mal venu de croire que toutes les politiciennes pratiquent les valeurs du care alors que leurs homologues masculins sont tous de sévères gestionnaires. L’auteure en est convaincue, un pouvoir spécifiquement féminin commun à toutes les femmes n’existe pas en tant que tel, mais le pouvoir peut et doit se décliner au féminin, un féminin mouvant et pluriel.

Afin d’étayer son argumentaire, mais aussi alimenter une réflexion critique, dans un jeu de va-et-vient qui sert bien le portrait complexe de la vie politique telle que vue et exercée par les femmes, Navarro structure son essai en sept courts chapitres, du plus lointain au plus proche, et du plus abstrait au plus concret. Le premier chapitre fait donc l’effort d’une mise en perspective historique en présentant le cas de l’affaire Personnes, l’aventure de cinq femmes canadiennes, les Famous Five, qui, en 1927, s’engagent dans une bataille juridique afin de faire reconnaître leur statut légal de personne bénéficiant de droits et de privilèges. Lorsque l’article 24 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique est amendé, deux ans plus tard, 14 femmes faisaient déjà partie du gouvernement de Ramsey MacDonald et l’une d’elles, Margaret Bondfield, siégeait comme membre du Cabinet. Exemple parlant de l’influence des femmes, cette affaire rappelle aussi que les cinq fabuleuses ont réussi à investir l’espace public, puis à faire entendre leur cause, en grande partie grâce à leur statut d’épouse et de mère. Longtemps, la maternité s...

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