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Reviewed by:
  • La transmisson narrative. Modalités du pacte romanesque contemporain dir. by de Frances Fortier et Andrée Mercier
  • Audrey Camus
La transmisson narrative. Modalités du pacte romanesque contemporain, s. la dir. de Frances Fortier et Andrée Mercier, Québec, Nota bene, 2011, 368 p.

Avec cet ouvrage collectif consacré aux « modalités du pacte romanesque contemporain », Frances Fortier et Andrée Mercier poursuivent avec bonheur le travail sur la narrativité qu’elles mènent de concert depuis quelques années. Vraisemblance, autorité, transmission – le livre traite simultanément des questions abordées tour à tour dans les étapes précédentes de leur recherche, se nourrissant de ces études préalables en même temps qu’il les enrichit grâce à l’effort de synthèse réalisé par ses deux auteures.

Il s’agit ici de reconsidérer le tour pris par la narration littéraire depuis 1990 en plaçant la dimension contractuelle de la transmission au centre de l’enquête, pour mettre en évidence le fait que, dans la littérature aujourd’hui, « le soupçon s’est, en quelque sorte, déplacé de l’écriture à la lecture ». Cette proposition stimulante se fonde sur la réflexion menée conjointement, lors d’un atelier international à Québec en 2010, par une vingtaine de spécialistes du contemporain dont beaucoup sont parmi les plus actifs des deux côtés de l’Atlantique.

L’ouvrage s’organise en trois parties dont l’articulation, qui fait la thèse de l’ouvrage, pourrait être retranscrite en ces termes : « l’autorité fictionnelle » est au cœur du pacte romanesque mis en lumière par Frances Fortier et Andrée Mercier, que viennent déstabiliser « les stratégies [End Page 406] de la voix narrative », pour mettre en cause l’« adhésion » du lecteur dont on s’emploie à montrer « les dessous ».

La première section s’ouvre par une contribution d’Yves Baudelle, intitulée « Nomination, autorité narrative et adhésion fictionnelle », qui pose d’emblée les enjeux de cette articulation. En poéticien, l’auteur y reprend la réflexion fondamentale qu’avec rigueur et constance il mène depuis de nombreuses années sur la manière dont l’« onomaturgie » modèle la vraisemblance de l’univers fictionnel représenté, et s’intéresse dans ce cas précis à l’autorité qu’elle confère au narrateur. Fondée sur un vaste corpus de romans de langue française parus entre 1990 et 2010, l’analyse rend compte des divers degrés d’adhésion engagés par des postures qui vont de la compétence à la défaillance patronymiques, dans une complète reconfiguration des rôles accordés aux vraisemblances pragmatique, empirique et diégétique. La pratique onomastique contemporaine, qui met en cause l’illusion mimétique pour lui préférer d’autres formes de crédibilisation, fait souvent la part belle au principe de plaisir, bien qu’elle témoigne aussi d’une « inquiétude ontologique ». Ainsi la remise en cause participe-t-elle moins d’une volonté de contester les formes romanesques anciennes que de séduire le lecteur en l’entraînant dans une exploration ludique.

Le constat d’une certaine inquiétude dans la représentation semble valoir pour l’ensemble des contributions réunies dans cette section consacrée à l’autorité fictionnelle, à commencer par celle de René Audet, qui étudie la facture d’œuvres contemporaines caractérisées par la fragmentation. Dans une analogie avec la conversation régie par les maximes de Grice que l’on aurait aimé voir approfondir, Audet y fait l’hypothèse que « la diffraction vient entraver la transmission narrative par la complexification du rapport du lecteur avec son interlocuteur », pour montrer que si les formes intermédiaires entre le roman et le recueil renforcent en fait l’autorité énonciative en malmenant la cohérence narrative, les textes travaillés par le blanc et l’interstice privilégient quant à eux l’ambiguïté.

Nicolas Xanthos s’intéresse pour sa part à la figure ambivalente du narrateur dans ces textes à l’issue incertaine qu’il appelle les romans d’enquête...

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