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Reviewed by:
  • Le nouveau récit des frontières dans les Amériques by Jean-François Côté et Emmanuelle Tremblay
  • Marie-Élaine Bourgeois
Jean-François Côté et Emmanuelle Tremblay, Le nouveau récit des frontières dans les Amériques, Québec, Les Presses de l’Université Laval, coll. Américana, 2005, 222 p.

Le récit de voyage, genre fondateur de la littérature étudié depuis des lustres par l’intelligentsia universitaire, pose la question de l’établissement des frontières. Qu’elles soient imaginaires ou réelles, celles-ci participent à la construction de la narration, certes, mais aussi et surtout à la formation de l’identité de qui voyage. Jean-François Côté, professeur à l’Université du Québec à Montréal, repense la question des limites territoriales dans son étude Le nouveau récit des frontières dans les Amériques, qu’il codirige avec sa collègue Emmanuelle Tremblay. La traversée des frontières, explique-t-il, implique « la confrontation de l’identité et de l’altérité dans un espace symbolique de médiation qui recompose chacun des termes en présence, dans la perspective d’une possible renaissance de leur communauté de sens et de signification ». De là découle une théorisation qui, pour lui, s’avère nécessaire étant donné le glissement du récit de voyage depuis les années 1950, ce dernier accordant plus d’espace à l’expression de thématiques telles l’errance, l’exil, l’altérité dont l’expression « au sein des frontières nationales et à travers elles, introduit une pluralité référentielle qui déconstruit le récit de la nation ».

Pour Côté, aujourd’hui, il est plus pertinent de parler de récits des frontières que de récits de voyage. C’est que les frontières sont ambiguës. [End Page 401] Elles sont porteuses de « culture en mouvement » et, de ce fait, nécessitent « une nouvelle exploration du territoire continental […] dans la remise en cause de ses frontières nationales [et] dans la mise en évidence d’une interrogation sur la signification des Amériques […] au travers d’une rencontre des différentes communautés et de la reconnaissance de leur “altérité réciproque” ». Le concept de frontières doit donc être redéfini pour assurer une « redécouverte » de la signification des Amériques, les frontières « nationales » n’étant plus prédominantes puisqu’à elles viennent se joindre les frontières « infranationales » et « transnationales » – la première désignant un espace d’une communauté culturelle au sein d’une culture nationale, la seconde se rapportant aux communautés culturelles qui existent au-delà des frontières nationales.

Ces notions sont envisagées dans les dix analyses que propose l’étude, soutenues par un corpus littéraire étatsunien, québécois, antillais, mexicain, brésilien et autochtone. Les deux premiers chapitres, « Le roman de la traversée des frontières chez les Chicanos et les Afro-Américains : quel cosmopolitisme au-delà du multiculturalisme? » (Côté) et « De l’impossible pénétration au fantasme de la reconquête. Les métaphores de l’altérité nord-sud dans la fiction mexicaine » (Tremblay), analysent chacun un angle précis des frontières. Dans le premier, ce sont les Chicanos, dans Klail City de Rolando Hinojosa, qui, afin d’être reconnus comme culture, doivent se construire leurs propres frontières, parce qu’envahis par la culture nationale. Ici, l’exemple-clé de frontières infranationales est illustré. Puis, dans Flight to Canada d’Ishmael Reed, le chercheur aborde deux entités nationales, les États-Unis et le Canada, et il montre que « l’intérieur » Canada, qui aurait dû être pour le personnage un « extérieur » des États-Unis, n’est en fait qu’un même, car les mêmes problèmes y existent. La traversée de la frontière n’a alors pas fourni l’expérience d’altérité souhaitée. Mais la retraversée, en revanche, assure « [une] renaissance, qui prend […] la forme d’une libération ». Ainsi la notion de frontières s’avère-telle au cœur...

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