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  • Après tout, la littérature. Parcours d’espaces interdisciplinaires dir. by de Blanca Navarro Pardiñas et Luc Vigneault
  • François Paré
Après tout, la littérature. Parcours d’espaces interdisciplinaires, s. la dir. de Blanca Navarro Pardiñas et Luc Vigneault, Québec, Presses de l’Université Laval, 2011, 258 p.

Les directeurs de ce recueil collectif, Après tout, la littérature. Parcours d’espaces interdisciplinaires, se sont fait connaître en 2010 pour leur excellente étude du philosophe basque Daniel Innerarity, dont les travaux sur les sociétés postmodernes méritaient alors assurément une meilleure diffusion dans le monde francophone. La série d’articles qu’ils font paraître un an plus tard, également aux Presses de l’Université Laval, poursuit indirectement cette entreprise, en interrogeant cette fois le rapport hiérarchique entre la philosophie et la littérature, tout en soulignant la nécessité de franchir les délimitations historiques entre les disciplines et les traditions culturelles. En effet, si l’histoire de la pensée philosophique occidentale reflète, selon eux, un rejet de la littérature condamnée à être une « entreprise fictionnelle sans droit de séance parmi les discours soi-disant “officiels” du savoir », il conviendrait aujourd’hui de renverser cette perspective dans la mesure où les enjeux interdisciplinaires l’exigent et le justifient. [End Page 398]

Dans leur introduction, Navarro Pardiñas et Vigneault insistent sur la méfiance bien connue de Platon à l’égard de la littérature. Condamnant l’esthétisme des formes qui serait l’enjeu premier de la poésie, le philosophe finit par subordonner le littéraire au philosophique. Plus tard, Nietzsche remontera d’ailleurs aux présocratiques pour faire de cette relation conflictuelle la forme même du questionnement sur le vrai : « Nietzsche en arrive à condamner ce qui pour lui est le plus gros mensonge de la philosophie occidentale, soit l’unicité de la vérité ». Le perspectivisme nietzschéen, dont s’inspireront Paul Ricœur et Daniel Innerarity, peut donc servir de fondement à une conception plus équivoque des rapports qu’entretient la philosophie avec la fiction et avec l’art de manière plus générale. Tel est du moins l’espoir des directeurs du présent volume au terme de leur introduction. Ne faudrait-il pas instaurer dorénavant, pensent-ils, une nouvelle mutualité entre ces deux grandes épistémologies discursives que sont la littérature et la philosophie?

Malheureusement, cette interrogation assez intéressante n’aura pas de suite véritable dans le reste du volume où il ressort plutôt une impression de vaste dispersion méthodologique, générique et disciplinaire. Suffit-il de placer côte à côte un article sur Hegel et un autre sur le romancier canadien David Adams Richards pour produire une recherche interdisciplinaire? Il est permis d’en douter. En effet, il est pratiquement impossible de trouver un quelconque rapport entre les articles très divers qui composent Après tout, la littérature. Tout y passe : Roland Barthes, Michel Foucault, les tragiques grecs, Giordano Bruno, José Ortega y Gasset, Hegel, Nabile Farès, Marguerite Yourcenar, Herménégilde Chiasson, Ian McEwan, Albert Camus, Arthur Rimbaud, et de très nombreux autres auteurs de tous les siècles et de tous les horizons.

Certes, une première section du volume est consacrée à la mise en rapport de la littérature avec un ensemble de disciplines connexes comme la géographie humaine, la sociologie, l’anthropologie et l’écologie. Par exemple, Marc Brosseau, faisant état de la pertinence de « l’expérience romanesque des lieux », cherche à dépasser l’utilisation primaire des textes comme documentation géographique. Ce qui l’intéresse, c’est plutôt une « conception de la littérature comme reflet d’une subjectivité » dans l’espace. Brosseau fait remarquer que la confluence de la géographie et de la littérature a surtout inspiré une étude des spatialités urbaines, surtout aux États-Unis où le roman Manhattan Transfer de John Dos Passos sert encore de point de référence. Il en appelle à une ouverture plus grande vers l’inscription du sujet dans...

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