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Reviewed by:
  • Les marges de l’œuvre dir. by de Jacinthe Martel
  • Hugues Corriveau
Les marges de l’œuvre, s. la dir. de Jacinthe Martel, Québec, Nota bene, coll. Séminaires, 2012, 176 p.

Le surgissement du sens donne à penser que le rayonnement diffus de l’écriture trouve ses lieux d’ancrage bien au-delà du livre, bien au-delà de l’objet texte qui définit l’en-soi de l’œuvre visible attribuée à quiconque. Il y a plus, il y a l’à-côté, le fragmenté des notes éparses, des cahiers et calepins, des paperolles et feuilles volantes, des napperons et autres supports qui viennent combler les archives, souvent inédites, d’un auteur désirant inscrire l’éphémère, d’appréhender l’espace comme volé au déroulement ou à la fuite en avant de toute vie.

Jacinthe Martel s’est intéressée à ces hors-d’œuvre sans superficialité, à ces lieux d’inscription de l’avant ou du pendant-texte, à cette saisie au brouillon flou ou révélateur d’un projet. Elle le signale explicitement dans sa présentation : « malgré leur caractère lacunaire, voire chaotique, et bien que la nature et la fonction de ces objets puissent varier d’un écrivain à un autre, les marges proposent, de diverses manières, un accès privilégié à l’invention. » Elle a convié au livre ce travail de dérive, ces inscriptions hasardeuses que beaucoup d’auteurs sont appelés à semer ici et là comme des signes de pistes.

François Dumont ouvre cette révélation des secrets avec une enquête posée dans les traces d’un « Jean-Pierre Issenhuth, écrivain marginal ». D’entrée de jeu, cette double posture de l’universitaire allant en quête des « marges » d’un écrivain « marginal » suscite la question de la pertinence de ce travail de fouille. Mais l’analyste, ne remettant pas en cause l’importance à ces yeux de ce critique Issenhuth qui se risquait à la [End Page 396] création, table d’emblée sur le rayonnement fort discutable d’une œuvre restée dans l’ombre de l’ombrageux qu’il était. Cela va permettre à François Dumont de se situer par rapport à la position critique d’Issenhuth, ce qui semble, à nos yeux, le but réel de l’entreprise. Dumont admirait cette parole critique à la limite de l’impertinence. Il en témoigne et signe. Quand Dumont nous rappelle étrangement que « dans les critiques d’Issenhuth, l’œuvre réussie est toujours proche de l’effacement », on se demande alors la raison de mettre celle-là en lumière. Les Carnets d’Issenhuth seraient une mise en œuvre de ce que souhaitait l’auteur, à savoir qu’« il faudrait mettre l’écriture au service de la connaissance du monde et de meilleures façons d’y vivre… » Cela qui nous amènerait sur le terrain des livres de psychopop, mais là n’est pas le propos.

Quant à Simon-Pierre Beaudet, il nous conduit directement aux fouillis d’un scrapbooking qui serait génial dans « La composition du livrearchive. Une pratique du collage chez Patrick Straram ». Là encore, aucun questionnement sur la valeur d’une telle entreprise littéraire ne prévaut. Les études ici présentées ne questionnant jamais la valeur de l’objet mis en évidence. On traverse sans grand intérêt nouveau les pérégrinations d’un auteur excentrique, à travers une entreprise de prise en charge de rébus et autres scories glanés au fil de ses voyages, surtout en Californie dans Irish coffee au no name bar & Vin rouge valley of the moon, livre présenté comme une sorte de quintessence de l’esthétique de la contreculture du début des années 1970.

Joëlle Comte rend plus pertinente cette entreprise de description passionnée des archives d’une œuvre en s’attardant à « L’itinéraire d’un jeu poétique : Le sacre de Paul-Marie Lapointe ». Fascinante traversée des notes et graphiques et dessins qui ont préparé une entreprise poétique unique et formaliste. L’à-propos de cette étude s’impose de page en page, tellement lumineuse nous para...

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