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Reviewed by:
  • Les Alouettes naïves by Assia Djebar
  • Maya Boutaghou
Assia Djebar, Les Alouettes naïves. Édition critique par Diana Labontu-Astier. (Entre les lignes, Littératures sud.) Paris: Honoré Champion, 2014. 118pp.

L’étude critique proposée par Diana Labontu-Astier répond bien aux attentes d’une approche didactique et scolaire. L’organisation de l’ensemble permet de saisir l’originalité de l’œuvre ainsi que les rapports subtils avec des éléments historiques, et autobiographiques. L’ensemble est d’une lecture agréable. On retrouve soulignés certains des traits constants de l’écriture d’Assia Djebar, entre expression de la mémoire individuelle et voix collectives. On regrette pourtant l’absence d’analyse du style si particulier de Djebar. Cette approche essentiellement thématique trahit une tendance récurrente dans les études francophones, à savoir une résistance systématique à l’approche esthétique au bénéfice d’une lecture historique et sociologique. L’introduction donne des informations sur le contexte de l’année de publication (1967) et sa place dans la production littéraire de Djebar. Le premier chapitre reprend dans le détail le contexte d’écriture. Le deuxième chapitre s’attarde sur la diégèse en suivant le plan du roman, il en reprend les principaux éléments de narration, et le caractère polyphonique qui devient une autre constante de l’écriture. L’auteur réutilise très vite l’expression ‘tangage’ que Djebar associe d’abord à la question du rapport du sujet postcolonial à l’Histoire, entre passé à penser et avenir à construire. Le troisième chapitre livre un portrait synthétique des différents personnages: d’un côté les figures de femmes, Nfissa, Nessima et les prostituées (Meriem, Zineb et Samia); de l’autre les figures masculines, Omar et Rachid. Parmi les thèmes judicieusement soulignés, notons celui du regard de Nfissa, promené à l’extérieur. La question de la construction identitaire dans une Algérie en pleine mutation vers la modernité est abordée dans les conversations entre Omar et Rachid, tout comme la figure du couple qui deviendra un des thèmes obsessionnels de l’auteur, et enfin la famille. La conclusion reprend avec justesse le rapport entre la guerre algérienne et la naissance de la subjectivité féminine, bien étudiée par Frantz Fanon, cité dans la courte anthologie critique à la fin de l’étude, et illustrée pour la première fois dans Les Alouettes naïves. Encore aurait-il fallu ajouter que ce trait thématique trouve un équivalent stylistique, par exemple, dans [End Page 113] l’usage des dialogues qui traduisent (en français) un parler-femme en arabe dialectal. Enfin, il eût été souhaitable de voir davantage abordés les liens entre Les Alouettes naïves et la production importante de l’auteur. En effet, cette étude souffre d’isoler parfois cette œuvre inaugurale, de ne pas la saisir en tant qu’elle résonne déjà de ce qui reviendra hanter la production romanesque de l’auteur, tant thématiquement que poétiquement. Le style de Djebar se construit par échos, d’abord au sein de chaque roman, dans une élaboration souvent complexe qui fait du texte une caisse de résonance, puis à l’échelle de l’œuvre tout entière. La bibliographie succincte est tout à fait utile, même si l’auteur choisit de ne faire apparaître que les ouvrages publiés en France en ignorant la grande richesse des études publiées aux États-Unis. Cet ouvrage reste cependant une introduction très utile à un roman d’Assia Djebar encore trop peu exploité par la critique.

Maya Boutaghou
Florida International University
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