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  • La supervision des thèses de second et de troisième cycles et l’ « apprentissage sur le tas »:conversation avec Bettina Bradbury
  • Dominique Marshall (bio)

À l’occasion de la table ronde que Magda a eu la bonne idée d’assembler pour parler des travaux de Bettina, j’ai pensé que je pourrais demander à celle qui a dirigé mes travaux de doctorat il y a 25 ans à l’Université de Montréal comment elle s’y est prise pour m’initier aux rouages du métier, et comment par la suite elle a fait de même pour des douzaines d’autres étudiants à la maîtrise et au doctorat.

La plupart de ses conseils font maintenant partie de mon bagage d’enseignante, pour le bénéfice d’une seconde génération d’étudiants, et je continue de lire les écrits de plusieurs de ses étudiants, dont la réputation contribue à faire de York un des hauts lieux d’entrainement à l’histoire. J’ai donc pensé que ma curiosité à l’endroit de son travail considérable de supervision, de même que le partage de souvenirs communs, pourraient faire l’objet d’une belle conversation, que nous avons tenue au téléphone, entre Toronto et Ottawa, en avril dernier1. Ce sont ces propos que je tenterai de partager avec vous cet après-midi, pour discuter de pratiques sur lesquelles ni Bettina ni moi avons beaucoup lu, puisqu’il y a peu d’écrits à ce sujet, de manuels d’instructions, d’occasions de formation professionnelle ou même de vocabulaire2.

Pour commencer, je lui ai expliqué d’où venaient mes questions. J’espérais avoir l’occasion d’explorer l’idée, encore floue, qu’aux cycles supérieurs, la transmission du métier d’historien, d’intellectuel ou d’universitaire se fait en grande partie en vertu d’un « apprentissage sur le tas. » À mesure que j’ai à mon tour supervisé des étudiants aux cycles supérieurs, il m’a semblé important de leur montrer comment je ferais à leur place, de leur donner à voir le meilleur de mes pratiques, sans trop planifier l’ordre dans lequel ces enseignements se produisent. Autrement dit, il m’est apparu qu’ils apprendraient surtout en me regardant faire. Plutôt par exemple que de leur donner des commentaires à difficulté croissante quand je lis leurs textes, j’essaye de leur montrer tout en même temps, en discutant de ce que j’aurais fait dans les mêmes circonstances, en confrontant leurs interprétations aux miennes. Avec le pari qu’ils auront [End Page 270] beaucoup à gagner en retenant, d’une rencontre à l’autre, et de façon aléatoire, ce qu’ils peuvent ou veulent retenir de mes méthodes, des mes habitudes de pensée. Mais par quels processus tout cela peut-il se produire? Osmose, imitation, répétition, observation, accumulation? Difficile à dire.

En sens inverse, il me semble qu’à ce jour mon propre parcours a été semé de moments forts où figurent la remarque d’un professeur quand j’étais encore étudiante ou, plus tard, les propos d’un collègue : telle institutrice de mathématique qui avoua un jour avoir eu tort dans l’une des réponses aux questions de la classe du jour précédent; tel professeur d’histoire urbaine rejetant mon ébauche de plan pour un long travail de recherche en disant qu’il ne me posait aucun défi intéressant. Bettina elle-même, après la première lecture d’une portion considérable de ma thèse, suggéra avec tout le tact nécessaire, qu’après avoir passé des mois à lire des archives gouvernementales, j’en étais venue à écrire dans le style des bureaucrates de mes archives; « first and foremost », conseilla-t-elle en me renvoyant à la planche, « you have to tell a story ».

C’est au sujet de ces influences, de ces temps forts de leur formation professionnelle, que je trouve souvent les candidats pour une bourse, un prix, un emploi, les plus éloquents. La série des conférences de l’American Council of Learned Societies intitulée « A Life of Learning » en a...

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