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Reviewed by:
  • Montréal et la métropolisation. Une géographie romanesque by Pierre-Mathieu Le Bel
  • Guy Mercier (bio)
Pierre-Mathieu Le Bel, Montréal et la métropolisation. Une géographie romanesque, Montréal, Triptyque, 2012, 212 p., 25$

Le titre réunit un phénomène et un concept. Le premier participe à la réalité du monde en revendiquant une certaine exclusivité sur une portion de l’espace terrestre. Le nom propre traduit cette unicité, faisant que [End Page 258] Montréal n’est pas Toronto ni aucune autre ville. Le second désigne un processus auquel toute ville – grande ou petite – serait aujourd’hui soumise. Ce processus, fortement lié à la mobilité accrue des individus, dissout en quelque sorte la ville en l’étalant et en la divisant, compliquant ainsi son problème d’identité et de gouvernabilité. La conjonction que formule le titre suggère que Montréal et métropolisation se prêtent à une commune réflexion, mais sans plus. La suite devra en dire davantage. Le sous-titre annonce pour sa part une géographie romanesque. La convocation de la géographie ne manque pas de pertinence. Depuis la publication en 1961 de Megalopolis par Jean Gottmann, cette discipline s’est affairée à étudier les causes et les effets d’une urbanisation qui aujourd’hui ne semble plus avoir de limites. Mais que lui vaut, à cette géographie de Montréal et de la métropolisation, d’être romanesque? Tient-elle du roman par son expression ou se prête-t-elle, à l’aide d’une méthodologie appropriée, à l’étude de romans? L’introduction précise que l’intention est de « voir comment la métropolisation est exprimée dans le roman québécois contemporain, et comment cette expression littéraire permet d’en explorer les multiples significations sociales et culturelles ». Cette explication fait comprendre que Montréal, malgré la préséance que le titre lui accorde, n’est, en l’occurrence, qu’une manifestation, parmi d’autres, de la métropolisation. L’équivoque ne se dissipe pas au fil de la lecture. Elle perdure plutôt, car la géographie romanesque en question, qui s’en remet à l’étude d’un grand nombre d’ouvrages – 58 exactement – où il est d’une manière ou d’une autre question de Montréal, s’attache essentiellement à dégager des traits de la métropolisation. Jamais, dans l’opération, Montréal n’apparait pour ce qu’elle a en propre. Constatant finalement la difficulté, Pierre-Mathieu Le Bel sent d’ailleurs le besoin de consacrer son dernier chapitre à cette géographie de Montréal que le titre, pourtant, laissait entrevoir. L’incipit se lit tel un aveu : « A-t-on oublié Montréal au fil de ce parcours littéraire? Est-ce qu’au détour de réflexions spatiales et temporelles suggérées par ma lecture du corpus j’avais laissé tomber la ville autour de laquelle ce dernier s’articulait justement? Le présent chapitre a pour but de remédier en partie à cette impression ». Bien qu’une remédiation soit tentée, l’impression demeure. Mais il s’agit là d’un moindre défaut, puisque l’exercice n’est pas, au total, sans mérites. L’analyse, en effet, démontre clairement que le roman contemporain est un fin révélateur de la métropolisation. Trois axes structurent cette exploration de la métropolisation dans l’univers romanesque. Le premier tient aux conditions que la métropolisation impose à la mémoire. Les unes la mettent en difficulté en compromettant la perpétuation d’une connaissance historique propre au lieu lui-même et aux membres de la société qui, de longue date, l’ont habité. Les autres, justement parce que le lieu est un tant soit peu dépouillé de sa dominance mémorielle, offrent aux sujets livrés à un certain nomadisme, voire à l’errance, la possibilité de [End Page 259] s’inventer, au gré de leur trajectoire personnelle, une mémoire. Le deuxième axe prend acte de la fragmentation sociale et spatiale inhérente à la métropolisation. Or cet éclatement brouille...

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