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Reviewed by:
  • Slavery and Antislavery in Spain’s Atlantic Empire éd. by Josep M. Fradera and Christopher Schmidt-Nowara
  • Jean Hébrard
Josep M. Fradera et Christopher Schmidt-Nowara (éd.) Slavery and Antislavery in Spain’s Atlantic Empire New York, Berghahn Books, 2013, 328 p.

Cet ouvrage collectif vient combler une lacune en offrant à ceux qui s’intéressent à l’esclavage atlantique et à son abolition une synthèse particulièrement intéressante sur le rôle tenu par l’empire espagnol dans cette double histoire.

L’introduction des deux coordonnateurs situe clairement le triple enjeu. Si, pendant près de quatre siècles, le monde colonial hispanique a produit des « sociétés avec esclaves » plutôt que des « sociétés esclavagistes » (ils reprennent la distinction classique d’Ira Berlin), le phénomène n’y a cependant pas joué un rôle négligeable. Si ce n’est qu’au XIXe siècle que l’Espagne s’est réellement investie avec Cuba dans l’économie de plantation et dans la traite atlantique qui lui est liée, réinventant en pleine révolution industrielle un modèle économique qui partout ailleurs était soit en sursis soit déjà abandonné, cela n’a pas été le fait de l’archaïsme d’un empire en déclin mais plutôt d’une restructuration du monde atlantique tout entier. Si le mouvement abolitionniste n’y a pas connu l’ampleur qu’il a eu dans les autres empires, malgré le contexte politique libéral dans lequel il aurait pu se déployer, il n’en a pas moins été présent tant en métropole que dans le territoire colonial ou dans la diaspora hispanique.

La démonstration est faite en onze chapitres. Les deux premiers installent le lecteur dans l’histoire longue de la colonisation atlantique. Josep Delgado Ribas montre comment les souverains successifs ont délégué la traite à leurs voisins, notamment portugais, pour, d’un côté, en tirer un bénéfice financier direct avec le système de l’assiento (privilège vendu à des compagnies privées étrangères) et, de l’autre, protéger l’extraction et le transport des métaux précieux américains en se refusant à entrer en concurrence avec les autres empires sur les marchés lucratifs – sucre et captifs africains – qui leur étaient abandonnés. D’une certaine manière, ce partage des ressources de l’Atlantique se retrouve aussi en ce qui concerne les âmes. Luiz Felipe de Alencastro décrit avec précision le système mis en place dès le XVIe siècle par la société de Jésus sur les deux rives (africaine et américaine) de l’empire portugais, dont la mise en esclavage des Africains a été une dimension centrale. Josep Fradera et Christopher Schmidt-Nowara rappellent qu’à la même époque certains clercs espagnols (Tomás de Mercado, Bartolomé de las Casas, Bartolomé de Albornoz…) développaient des arguments qui n’étaient pas sans anticiper sur ceux des abolitionnistes britanniques de la fin du XVIIIe siècle. Peut-être, du point de vue de l’économie générale de l’ouvrage, les développements comparatifs sont-ils insuffisamment présents dans la contribution de L. de Alencastro.

Les neuf autres chapitres s’installent délibérément dans le renversement tardif qui fait de l’Amérique espagnole – ou du moins de ce qu’il en reste à l’issue des premiers mouvements d’indépendance – l’une des terres privilégiées de ce que Dale Tomich a appelé le « second esclavage1 ». Ce système se met en place pour l’empire espagnol avec l’abandon de l’assiento en 1789 et, donc, avec la pleine liberté conférée aux trafiquants transatlantiques puis, du fait de la révolution haïtienne (1791-1804), avec l’opportunité rapidement saisie de faire de Cuba la principale île à sucre de la Caraïbe. C’est donc Cuba qui est au centre de la plupart des contributions, soit comme pôle principal de la traite, y compris lorsqu’elle est devenue illégale, soit comme lieu d...

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