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Reviewed by:
  • The Politics of Fiscal Privilege in Provence, 1530s-1830s by Rafe Blaufarb
  • Élie Haddad
Rafe Blaufarb
The Politics of Fiscal Privilege in Provence, 1530s-1830s
Washington, The Catholic University of America Press, 2012, XIII-299 p.

Fortement problématisé, fondé sur une riche documentation et une ample bibliographie, le livre de Rafe Blaufarb développe une thèse dont la portée dépasse largement son objet : l’analyse du procès des tailles en Provence sur trois siècles remet en cause la conception de l’absolutisme comme collaboration sociale entre la monarchie et la noblesse, et montre que l’impôt a été le moteur et non la conséquence du processus de centralisation et de l’extension du pouvoir de l’État dans les provinces. La fiscalité royale a en effet opposé les élites locales, particulièrement le tiers état et la noblesse, et placé la monarchie en position d’arbitre, ouvrant la porte à son intervention accrue dans les affaires provinciales. Plus encore, les conflits entre les différentes élites locales, les multiples procès sur les tailles au niveau des villages, ont contribué à générer les antagonismes sociaux qui se sont exprimés lors de la Révolution. L’histoire du procès des tailles de Provence permet donc de jeter un nouvel éclairage sur la montée et la chute de l’absolutisme français.

L’auteur souligne d’entrée l’inadéquation des catégories de pays d’états et pays d’élections, les premiers de taille réelle et les seconds de taille personnelle, pour décrire la diversité des modes concrets de prélèvement de l’impôt royal et appréhender l’historicité de l’exemption nobiliaire de la taille. Il analyse dans le détail la complexité et les enjeux sociaux et politiques des rapports entre réalité et personnalité de l’impôt, d’une part au niveau provincial, à travers les luttes entre les représentants des communes et ceux de la noblesse, d’autre part au niveau local, en se fondant particulièrement sur quatre villages dont les procès entre seigneurs et communautés sont étudiés en profondeur sur les trois siècles.

Le premier chapitre décrit la mise en place du système fiscal provençal. D’origine angevine, il constitue largement une réponse à l’augmentation du poids de la taille pour financer les guerres d’Italie et celles des Valois. Les États négocient avec le roi le montant de la taille, c’est-à-dire de la somme globale à verser au roi (les Provençaux ayant obtenu l’abonnement aux droits domaniaux, intégrés dans la charge fiscale annuelle), et répartissent l’impôt entre les vigueries, ces dernières faisant la même chose parmi les communautés, dont l’importance ne se dément jamais durant la période. Entre les sessions des États, l’administration est assurée par les « procureurs du pays », tous membres de la municipalité d’Aix, ce qui confère une place importante au tiers état dans la gestion des affaires provençales. Cette place est renforcée par les assemblées générales des communautés établies durant le XVIe siècle et regroupant les procureurs du pays, l’archevêque d’Aix et les représentants des trente-six villes privilégiées de la province. [End Page 227] De nombreuses villes et quelques communautés rurales utilisent leur autonomie fiscale pour prélever des octrois qui leur permettent de couvrir partie ou totalité de leur imposition royale, dont le poids porte ainsi moins sur la terre : une manière de protéger les intérêts des propriétaires fonciers.

Le système est source de conflits : entre communautés ou vigueries, certaines se jugeant trop taxées par rapport à leurs voisines, entre l’administration provinciale et ceux qui réclament des exemptions personnelles ou corporatives (chevaliers de Malte, employés des Fermes, princes du sang...), entre la province et les territoires limitrophes sur des questions de frontière, entre les vigueries et Arles ou Marseille, qui ont leur propre autonomie fiscale par...

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