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Reviewed by:
  • Gaston d’Orléans. Entre mécénat et impatience du pouvoir by Pierre Gatulle
  • Olivier Poncet
Pierre Gatulle
Gaston d’Orléans. Entre mécénat et impatience du pouvoir
Seyssel, Champ Vallon, 2012, 433 p. et 57 ill.

Mécénat d’abord : tel pourrait être, sous forme de boutade, le credo du Gaston d’Orléans que nous brosse savamment Pierre Gatulle. Biographie au meilleur sens du terme, la recherche qu’il conduit s’attarde sur des aspects méconnus, à tout le moins dispersés dans d’érudites études, du frère de Louis XIII. L’ouvrage est ordonné classiquement selon un plan chronologique, qui dégage la jeunesse, puis un temps d’« impatience » de la fuite en Lorraine (1631) jusqu’à la mort du roi (1643), avant de revenir sur la figure de l’oncle du roi régnant jusqu’à sa mort en 1660. Le rapport au trône imprime clairement la destinée du second fils d’Henri IV, né en 1608. Souverain « possible » jusqu’en 1638, Gaston a connu une existence tour à tour enthousiaste, agressive, inquiète ou encore placide. Privé durablement des attributs de la souveraineté, il n’en a pas moins tenté de les rêver et de les faire rêver à d’autres. En toile de fond et comme un moteur essentiel de cette action figurent les réseaux qui gravitent autour du duc d’Orléans. Pour ce faire, P. Gatulle mobilise l’historiographie des clientèles et des fidélités, qu’il croise avec des réflexions sur le mécénat littéraire et artistique. Le résultat est convaincant.

L’auteur met en avant des œuvres et des domaines d’ordinaire relégués dans des écarts disciplinaires. Le sort ainsi réservé aux jetons et médailles, à leurs thèmes iconographiques et aux légendes qui les accompagnent mérite d’être souligné. Plus encore, l’usage qui est fait des ballets, de leurs livrets et de leurs représentations iconographiques est suffisamment singulier dans l’exposé de la vie politique de la France du premier XVIIe siècle pour qu’on ne s’y arrête pas. Le ballet parcourt comme un fil rouge les rêves de souveraineté de Gaston durant près de deux décennies et l’on ne tient pas rigueur à P. Gatulle de donner parfois le sentiment de surévaluer la place de ces expressions politico-artistiques. Tout juste regrette-t-on qu’il n’ait pas assez insisté sur le mode de diffusion de ces réalisations : comment, par exemple, les jetons parviennent-ils à la connaissance du public, quels en sont les possesseurs et de quelle circulation font-ils l’objet? S’agissant des ballets, combien de personnes pouvaient assister aux représentations et combien d’imprimés en étaient tirés? Certes, les sources sont rares, mais il n’aurait pas été inutile de qualifier davantage les effets de pareilles sources de propagande (interne pour les jetons distribués d’abord aux fidèles, externe pour les ballets vus de toute la cour).

La galaxie des personnages qui gravitent autour de Gaston d’Orléans est bien décrite. Il est dommage à cet égard d’avoir cantonné le précieux dictionnaire final à une définition aussi étroite que floue (« une relation de protectorat mécénique », p. 374), excluant ipso facto des personnages aussi importants que Jacques Le Coigneux ou Louis Barbier de La Rivière, qui ont la faiblesse de n’avoir pas composé des pièces de vers pour Gaston, alors qu’on y trouve la figure trop méconnue de Roger de Saint-Lary, duc de Bellegarde, sans doute parce qu’il protège lui-même plusieurs prosateurs et érudits, dont Aimé de Gaignières – et non Gaignères –, le père du célèbre collectionneur du règne de Louis XIV. L’utilisation récurrente du terme de stratégie pose parfois problème : dans quelle mesure tel ou tel littérateur, comme Tristan L’Hermite (longuement analysé), maîtrise-t-il toutes les inflexions qu’il donne à son œuvre et à son service? Les recompositions de cercles, à l’issue...

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