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  • Spectateurs de paroles ! Délibération démocratique et théâtre à Athènes à l’époque classique by Noémie Villacèque
  • Pauline Schmitt Pantel
Noémie Villacèque
Spectateurs de paroles ! Délibération démocratique et théâtre à Athènes à l’époque classique
Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, 432 p.

« Spectateurs de paroles et auditeurs d’action », c’est ainsi que Cléon, homme politique athénien de la fin du Ve siècle av. J.-C., nomme les Athéniens présents à l’assemblée. Noémie Villacèque écrit l’histoire de « la démocratie comme spectacle » à Athènes, de la fin du VIe à la fin du IVe siècle av. J.-C. (508-322 av. J.-C.), en plaçant au centre de son étude la question de l’analogie entre le théâtre et la politique. Son but est de comprendre et déconstruire le topos de la démocratie comme spectacle. Pour ce faire, elle précise les formes et les enjeux de la participation du dèmos (le peuple des citoyens) pour montrer que « la démocratie comme spectacle » n’est pas un simple lieu commun mais une représentation sociale largement partagée par les Athéniens, qui a été utilisée à des fins et à des degrés divers durant deux siècles. C’est parce que les Athéniens constatent dans les faits une ressemblance entre les assemblées politiques et judiciaires et le théâtre qu’ils élaborent le topos du spectacle de la démocratie. Interroger ce topos, ses fondements historiques et son évolution permet à N. Villacèque d’éclairer d’un jour nouveau les pratiques délibératives des citoyens et d’interroger la nature même de la démocratie.

Pour mener à bien cette étude, N. Villacèque a recours à trois types de sources : littéraires, iconographiques et archéologiques. Les premières sont les plus sollicitées car les plus utiles pour le sujet. Elles comprennent l’ensemble du corpus théâtral comique et tragique, tout particulièrement Aristophane parce qu’il met en scène de nombreuses assemblées judiciaires et politiques, puis le corpus des orateurs attiques de Lysias à Hypéride, qui fait revivre ces mêmes assemblées. Les historiens Thucydide et Xénophon décrivent et jugent les institutions et les comportements. Platon, à la fois témoin du IVe siècle av. J.-C. et théoricien, dénonce le caractère spectaculaire du régime athénien. Aristote, enfin, observe le phénomène théâtral et l’histoire politique de la démocratie. C’est l’essentiel de la littérature athénienne des Ve et IVe siècles av. J.-C. qui est utilisé, une longue durée qui pose le problème de la variation du sens des textes selon les contextes historiques et, bien sûr, selon les discours. Croiser les sources est une méthode que connaît bien l’historienne.

Les données iconographiques sont pour leur part pauvres : les assemblées ne sont pas un thème retenu par l’imagerie athénienne, exception faite d’une stèle de Dèmos couronné par Demokratia qu’étudie N. Villacèque. Quant à l’archéologie, elle est indispensable pour comparer les lieux de rassemblement : la Pnyx, le théâtre de Dionysos et les espaces judiciaires. Au-delà de la similitude des configurations, il faut savoir comment le peuple des citoyens occupe ces différents espaces et comprendre comment ils évoluent. Le plan du livre en trois parties s’appuie sur ces types d’espace : le théâtre de Dionysos et la mise en scène de la politique, les tribunaux et leurs drames judiciaires, la colline de la Pnyx et les pratiques délibératives, mais la pluralité de fonction des lieux et la perméabilité des sources rendent fréquents les échos d’une partie à l’autre.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, un chapitre préliminaire campe le contexte historiographique [End Page 187] (la question de la participation du dèmos est en effet un sujet très débattu par les...

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