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Reviewed by:
  • Proust est une fiction by François Bon
  • Edward Ousselin
Proust est une fiction. Par François Bon. (Fiction et Cie.) Paris: Seuil, 2013. 352 pp.

Ce livre était au départ un projet en ligne sur le blog de l’auteur, avec précisément cent textes, de longueur et de qualité forcément inégales, consacrés à l’œuvre de Marcel Proust: <www.tierslivre.net/spip/spip.php?article3416>. Alors que le sommaire en ligne annonce que ‘chaque billet comporte dans la colonne de droite une sélection de mots-clés qui vous permettra navigation transversale dans le web-livre’, l’édition sur papier renvoie nécessairement à la traditionnelle linéarité, plutôt qu’à la transversalité cybernétique, ce qui conduit à se demander pourquoi ce livre a été publié. Le ton, très personnel, permet de mélanger citations, commentaires critiques et rencontres fictives—par exemple, avec un Proust littéralement d’outre-tombe au Père-Lachaise ou entre Proust et Baudelaire (à plusieurs reprises). Ancien ingénieur, et auteur de nombreux ouvrages depuis une trentaine d’années, François Bon se sert d’outils statistiques dans le cadre de ses recherches sur les écrits (numérisés ou imprimés) de Proust. À chaque lecteur de décider si de nouvelles lumières s’en dégagent: ‘Saint-Simon hante la Recherche [End Page 261] bien au-delà des trente-quatre occurrences qui le nomment, mais c’est plus discret, plus dans le mécanisme même du livre’ (p. 86). Les aperçus critiques de l’auteur deviennent plus intéressants au fur et à mesure que s’estompe l’arrière-plan technologique de son recueil de textes: ‘Parce qu’il s’agit d’écriture, Bergotte n’est certainement pas, dans la Recherche, l’équivalent d’Elstir ou de Vinteuil’ (p. 126). L’enthousiasme de Bon pour une œuvre qu’il connaît en détail doit être salué, tout comme ses références à des textes critiques moins célèbres (celui de Samuel Beckett, par exemple). Les chemins de traverse, parfois étonnants, qu’il établit entre l’œuvre de Baudelaire (dont le personnage est ici représenté sous la forme d’un bourru loquace, mais peu bienfaisant et fort jaloux) et celle de Proust constituent l’unique ligne directrice de ces textes le plus souvent épars. À signaler cependant que parmi les premiers textes, plusieurs portent sur le regard qu’a porté Proust sur les innovations techniques de son époque (téléphone, ‘aéroplane’, etc.). Le nombre de textes que contient Proust est une fiction renvoie évidemment au centenaire du début de la publication de la Recherche. Vers le milieu de son essai éclaté, émietté et parsemé d’envolées romanesques, Bon se livre à une confession sous forme de révélation soudaine, retraçant son parcours d’écrivain, sur lequel Proust fait initialement figure d’obstacle: ‘Longtemps, je me suis heurté à Proust comme à un mur. Une promesse plus qu’une obligation, mais je n’avais pas les clés pour y entrer’ (p. 143). Le récit de son accès éventuel à l’univers proustien, et à travers lui à sa propre écriture, permet à Bon de s’approprier la fameuse circularité qui caractérise la Recherche. Ses tentatives d’émulation (au sens informatique) rencontrent toutefois moins de succès en ce qui concerne la densité et la structure multidimensionnelle de l’œuvre proustienne. Que la lecture de celle-ci ait été déterminante pour Bon n’est guère surprenant. Qu’il ait voulu confier à d’autres lecteurs ses liens avec cette ‘fiction’ non plus. Était-ce pour autant nécessaire de transposer ses textes du blog au livre?

Edward Ousselin
Western Washington University
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