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  • Les Cinémas d'Afrique des années 2000: Perspectives critiques by Olivier Barlet
  • Safoi Babana-Hampton
Barlet, Olivier . Les Cinémas d'Afrique des années 2000: Perspectives critiques. Paris: L'Harmattan, 2012. ISBN 9782296557604. 440 p.

Au moment où des événements globaux d'une échelle et d'une gravité sans précédent agitent l'Afrique comme le reste du monde et où les révolutions numériques nous imposent une remise en question de la création cinématographique et du rôle du cinéaste en Afrique, l'étude d'Olivier Barlet tombe à point. Ouvrage d'une ambition remarquable, Les Cinémas d'Afrique des années 2000 a pour objectif principal de poser de nouvelles bases pour la critique de l'art cinématographique en Afrique à l'heure des révolutions arabes et des transitions importantes que connaissent les pays africains dans leur relation avec la France ainsi qu'avec le reste du monde au tournant du troisième millénaire. Le pari de repenser le discours critique sur les cinémas d'Afrique en conséquence de cette prise de conscience historique est nettement mis en avant dans l'introduction de l'ouvrage: "la pensée critique est plus que jamais nécessaire. C'est donc sur l'enjeu critique que s'ouvre et se ferme cet ouvrage" (11). Au moment où la critique des cinémas d'Afrique est en crise et fait défaut, l'intérêt de cet ouvrage réside précisément dans sa préoccupation, sérieuse par ce projet métacritique, où c'est la critique et non les films qui fait l'objet primordial de l'analyse entreprise par Barlet, contrairement à la tendance qui avait prévalu longtemps dans ce domaine. En se laissant interpeller par l'extrême diversité des nouvelles réalités continentales et globales dans lesquelles s'inscrivent les cinémas d'Afrique des années 2000, Barlet reconnaît l'importance de rompre avec toute posture de sociologue ou d'observateur en envisageant son compte rendu de ces cinémas non comme discours critique sur les cinéastes africains, mais plutôt comme dialogue responsable et engagé entre lui et eux en vue de s'interroger sur le regard critique porté jusqu'ici sur les productions cinématographiques d'Afrique et d'en exposer les déficiences. L'inscription directe des voix des cinéastes à propos des défis à relever pour l'avancement des cinémas d'Afrique est ainsi notable. Cela nous offre un ouvrage riche en perspectives croisées, qui passent au tamis des problématiques déterminantes telles que l'effet asphyxiant des mythes de l'authenticité, l'accès difficile au marché international, l'invisibilité des cinémas d'Afrique au sein des festivals internationaux ou encore leur enfermement dans le ghetto de la "différence" que leur impose la désignation vigoureusement contestée de "cinéaste[s] africain[s]" qui omet de les reconnaître comme "cinéaste[s] tout court" (49)-autant d'obstacles qui ont "pour effet de brider les possibles, et donc la créativité" (48). Pour ajouter à la complexité des éclairages offerts, Barlet multiplie les renvois aux écrivains et penseurs phares d'Afrique et des Antilles, tels Fanon, Mbembe, Glissant, Chamoiseau et tant d'autres, afin de jeter des ponts entre leurs visions du monde et celles qui structurent l'imaginaire cinématographique [End Page 278] des cinéastes d'Afrique dont l'attachement aux valeurs modernes d'affirmation de la subjectivité et de la pensée libre et critique constitue un point de convergence décisif.

Si l'étude de Barlet livre un regard autocritique et métacritique percutant et fortement convaincant pour percer le paysage mouvant et profondément divers des cinémas d'Afrique et mettre ainsi en valeur le génie artistique des cinéastes d'Afrique dans la conjoncture actuelle, on aurait souhaité voir la même rigueur d'analyse dans son compte rendu des femmes cinéastes. Quoique l'ouvrage fasse référence à des femmes cinéastes, l'accent n'y est pas mis sur la singularité de leurs perspectives...

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