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  • Poétique de l’invective romanesque. L’invectif chez Louis-Ferdinand Céline et Réjean Ducharme by Marie-Hélène Larochelle, and: Réjean Ducharme. Une marginalité paradoxale by Élisabeth Haghebaert, and: Présence de Ducharme ed. by Marie-Andrée Beaudet, Élisabeth Haghebaert and Élisabeth Nardout-Lafarge
  • Caroline Barrett (bio)
Marie-Hélène Larochelle, Poétique de l’invective romanesque. L’invectif chez Louis-Ferdinand Céline et Réjean Ducharme, Montréal, XYZ éditeur, coll. Théorie et littérature, 2008, 224 p., 25$
Élisabeth Haghebaert, Réjean Ducharme. Une marginalité paradoxale, Québec, Nota bene, coll. Littérature(s), 2009, 382 p., 28,95$
Présence de Ducharme, s. la dir. de Marie-Andrée Beaudet, Élisabeth Haghebaert et Élisabeth Nardout-Lafarge, Présences Québec, Nota bene, coll. Convergences, 2009, 351 p., 29,95$

Trois essais sur l’œuvre de Réjean Ducharme : un bonheur, une véritable manne pour les inconditionnels de l’écrivain. De factures très différentes, ces ouvrages ouvrent des perspectives inédites sur le travail de cet écrivain singulier.

Avec Poétique de l’invective romanesque. L’invectif chez Louis-Ferdinand Céline et Réjean Ducharme, Marie-Hélène Larochelle propose une analyse bien structurée et tout à fait passionnante de l’invective et surtout de l’invectif en littérature. Par invective, il faut comprendre « la lutte, le conflit, la querelle, systèmes de relations de la violence verbale », comportements a priori asociaux et hostiles, qui, une fois investis par certains esprits malins (dans tous les sens du terme) peuvent pourtant se transmuer en éloquence, [End Page 786] voire en véritable art oratoire. Qui mieux que Louis-Ferdinand Céline et Réjean Ducharme pour incarner cette « personnalité maligne » puisque « [r]ésonne [ … ] chez eux le même savoir-faire : celui des auteurs qui ont constitué une nouvelle tradition de la parole violente »? Chez Céline, la violence verbale se fait excessive et tonitruante alors que Ducharme apparaît plus retors dans sa pratique. Larochelle en profite d’ailleurs pour remettre à plat certaines idées reçues concernant ces deux auteurs. Au sujet de Louis-Ferdinand Céline, distance est prise avec la traditionnelle analyse littéraire des romans à la lumière des pamphlets à connotation antisémite. Quant à Ducharme, l’auteure interroge la tendance à surestimer le côté ludique et ironique du langage ducharmien faisant du coup l’impasse sur la part d’ombre de l’œuvre. Peut-être faut-il voir dans cette occultation la manifestation d’un certain inconfort face à une écriture qui, sous une apparente convivialité, peut aussi se révéler meurtrière.

D’entrée Larochelle annonce la couleur : son sujet n’est pas un sujet commode, il se montrerait même plutôt rébarbatif dans la mesure où la force et la vigueur de l’invective dans sa forme littéraire en rendent la lecture particulièrement éprouvante. Pourtant, elle s’accroche et n’hésite pas à s’engager — et à nous engager avec elle — dans cette voie puisque, affirme-t-elle, « la fureur est aussi une structure de créativité ». Le projet est sans ambiguïté : « Comprendre et interpréter l’invective comme un fait de texte [ … ] » (en italique dans le texte). Or l’invective est aussi une action, « un agir verbal », un événement : « sa production est une force [ … ]. Son dire est tout entier au service de l’événement agressif — comme l’est le coup de poing ou le tir de revolver ». Et de même qu’il existe des énoncés performatifs, c’est-à-dire des énoncés « dont l’énonciation accomplit l’événement qu’ils décrivent » portés par des verbes tels que conseiller, décider, jouer, promettre, jurer, Larochelle propose la notion d’invectif. Le performatif et l’invectif ne sont pas pour autant permutables. Le performatif supporte mal l’écran littéraire et son inscription dans le temps, alors que l’invectif se rapprocherait plutôt du spectacle, de la « performance » au sens théâtral du terme. En outre, pour aborder l’œuvre de ces deux auteurs, Larochelle tient compte du décalage entre la France et...

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