In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

512 LETTRES CANAOIENNES 1996 comprehensibles (a~ plan litteraire). Toutefois, Ie probleme demeure au niveau de l'exploitation conceptuelle: par son etymologie, l'mterculture suppose l'imbrication des elements culturelsau tout au moins des echanges entre civilisations differentes. Mais, l'analyse de Semujanga seIl}.ble consacrer 1'« exclusion» plut6t que l'interaction suggeree par son titre (en plus de melanger expose methodologique et analyse, il a refoule ce point essentiel dans la conclusion, consacrant la partie analytique au face aface des cultures). L'element « partage» est absent de L'eeart oU .regnent Ia contestation et la repulsion. Cette realite romanesque .contraste avec la conclusion ou, certainement au nom de Ia petition de principe, l'auteur affirme: «Les interactions sont constantes entre les peuples et les civilisations par I'emprunt culturel ». Ne s'agit-il pas plutot de l'intertextualite ? Dans Iequel cas, l'interculturalite serait evoquee par l'enonciateur pour se dMinir et non pour marquer les elements qui interferent dans l'identite, comme Nara qui« a dft. utiliser la langue de l'Autre pour parler de sa prepre culture et de la culture Wliverselle ». En effet, Semujanga reconnait - contredisant une grande partie de son essai - que la langue fran<;aise (un element de cette interculturalite) n'est qu'un outil. Bebec de l'interculturel? Toutefois, fidele ason dessein (Configuration de l'enonciation interculturelle... ), l'auteur a centre son analyse sur les procedes expressifs du texte et non sur la reaHte de l'interculturalite. En ce qui conceme Ie texte, de multiples repetitions (Ie terme « convoquer » est repris plus de cinquante fois, sans compter ses derives) ajoutent al'ennui de la lecture et accreditent la these de la negligence. La surabondance des jeux de mots reduit l'intelligence du texte acelIe de quelques termes comme «axiologie », «figure », etc. Au plan du style, Semujanga recourt excessivement au participe present au lieu de la proposition relative; tendance actuelle, certes, mais qui ne va pas sans degat compte tenu des subtilites que seule.Ia proposition relative peut rendre, asavoir la determination et l'explication. En plus, Ie melange incessant des aspects oraux et ecrits du discours, illustre par l'emploi du trop grand nombre de formules introductives (<< jevais Ie dire», «je terrninerai», « jepeuxciter » ...) font croire aun calque d'un expose oral que l'iiuteur aurait dt1 adapter a l'ecrit pour publication. Tous ces abus diminuent Ie plaisir de lire un livre au titre par ailleurs allechant. Cependant, l'essai de Semujanga ouvre une interessante voie d'acces aIa litterature comparee, domaine qui a longtemps souffert d'un sectarisme reducteur..(KAPELE KAPANGA) De paroles en figures. Essai sur les litteratures africaines et antillaises, s. la dir. de Christiane Ndiaye et Josias Semujanga Montreal, Harmattan, 177 p. Le collectif De parole enfigures. Essai sur les litteratures africaines et antillaises aborde Ie probleme des litteratures africaine et antillaise par des approches SCIENCES HUMAINES 513 diverses, allant de la semiotique (Josias Semujanga) a la linguistique (Ibrahim H. Badr),enpassantpar Ia sociolinguistique (Amadou Kone,JeanMarie Vianey Kayisehema et Christiane Ndiaye) et la stylistique (Lucy Stone-McNeece et Bedhonvapi Olema). ,Malgre Ie grand handicap des litteratures francophones d'Afrique et des Antilles, asavoir l'incompatibilite postulee de l'oralite, « base de l'education » des createurs, et les langues etrangeres (occidentales) qui servent a l'ecriture (surtout en ce qui concerne Ie roman et l'epopee), les ecrivains africains (surtout) arrivent a tirer leur epingle du jeu en adoptant des approches qui assurent Ie succes de leur ecriture sans sacrifier leur identite collective. Ce succes permet la rencontre de l'autre et l'auto-affinnation par«des coupes transversales sur les genres artistiques et litteraires ». En dressant des paralieles entre les reuvres du meme auteur Oosias Semujanga ) ou entre la production litteraire de plusieurs auteurs (Christiane Ndiaye), les critiques tentent de prouver Ia permanence d'un fiIon, identitaire pour l'un et thematique pour l'autre. Les collaborateurs ambitionnent de faciliter l'exploration de la poetique africaine (et antillaise) en proposant des jalons d'analyse (Olema) et en lanc;ant une mise en garde contre la «mauvaise» approche des «figures rnetanarratives» (Stone-McNeece). Enfin,la litterature (poesie) africaine et antillaise se signale par des procedes comme la personnification et la metaphore qui font d'elle une litterature «du renouveau et de la renaissance ou l'image a une fonction bien determinee» (Badr). Cependant, quelques corrections et des precisions rendraient certaines de ces etudes plus convaincantes et plus profitables. Ainsi la presentation du materiel d'appui (Kone), la disponibilite d'elements du corpus (McNeece), dans leur ensemble ou dans la plus grande partie (Badr) aurait justifie la generalisation des observations, apaise les apprehensions primaires et nuance certaines prises de position en precisant leur pertinence . Le rejet de chaque element de comparaison aurait du etre justifie; ainsi la difference entre les variantes de la chanson Mabele (celie d'Olema et ceIle d'autres analystes) ne justifie pas Ie rejet de ces demieres, surtout si on sait que la diversite de variantes du meme materiel enrichit et renforce les resultats de J'analyse, en plus de confirmer la dominante stylistique de l'auteur. II en est de merne pour l'option des procedes litteraires: ceUe critique aurait dil avantageusement 5'ouvrir vers d'autres figures que la metaphore: par exemple vers les procedes d'expression ou les tropes d'elocution, de pensee ou de style, et surtout ceux de construction, car les chansons sont ecrites avant d'etre chantees. Cette ouverture donnerait une vue plus complete et plus objective de la poetique d'un auteur, et ce n'est pas la bibliographie qui manque dans ce domaine. Sur un autre plan, la volonte de legitimer Ie« transculturel» dans l'reuvre d'un meme createur par I'interference semantique (Sernujanga) entre Ie roman et Ie theatre, comme la tendance a ]a reduction de la fonction poetique aI'etude de la poetique semblentabusives. En effet, une comparaison des reuvres d'auteurs 514 LETTRES CANADIENNES 1996 differents, issus d'horizons culturels differents aurait ete necessaire pour Ie premier cas; quant au deuxieme, la poetique ne saurait se reduire ala fonction poetique. Dans l'ensemble, des references critiques plus nombreuses et plus recentes donneraient acces al'actualite scientifique. Hormis ces quelques remarques, Ie collectif De parolesenfigures presente W1e somme d'interessantes voies d'acces a la litterature africaine et antillaise au moment ou se bousculent les hypotheses les plus divergentes et ou la litterature africaine tente de repondre au « rendez-vous du donner et du recevoir» des litteratures francophones mondiales. n offre aux critiques Ia possibilite de transcender Ie generique et d'aller au-dela de la srrate superficielle de I'ecriture pour decouvrir Ie sens profond de I'ceuvre; il foum~t enfin un compendium de renseignements susceptibles de generer de nouvelles reflexions, apartir d'autres parametres et d'autres approches, pour l'avancement· des sciences litteraires et l'intercomprehension francophone. (KAPELE KAPANGA) Jacques Julien, Parodie-chanson. L'air du singe Montreal, Triptyque, 1995, 183 p. II s'est ecrit beaucoup de choses sur un lien possible entre Ies grandes desillusions ideologiques de cette fin de rnillenaire et l'essor d'une certaine industrie de l'humour depuis Ie debut des annees 1980. Dans Ia mesure ou, ces demieres armees, Ie Quebec 5'est revele etre un terrain particulierement fertile al'humour (on pense ici au Musee de l'humour et au festival Juste pour rire), il apparait normal que des etudes, fussent-elles serieuses et universitaires, s'interessent acertains aspects du rire. CJest l'angle de la parodie que Jacques Julien emprunte pour son troisieme livre sur la chanson aux Editions Triptyque. Pourquoi la parodie? Depuis son livre sur Charlebois, l'auteur s'interesse a la chanson metalangagiere , ceIle qui parle d'elle-meme, comme Ia tres serieuse Ordinaire qui exorcise la douleur d'un chanteur populaire aux prises avec Ie systeme de vedettariat. C'etait la la porte d'entree sur un registre plus humoristique: celui de la chanson qui parle de la chanson... des autres, si ce n'est carrement des autres, avec plus ou moins de mechancete; un dosage savant de satire et de burlesque dans une forme parodique qui parvient a provoquer Ie rire apartir des airs que l'on se donne. Puisqu'il s'agit d'une etude serieuse, un cadastre du territoire sJimpose avant l'occupation. Car rire «juste pour rire» ne suffit pas et ne pas rire alors qu'« il y a matiere» est plutot desolant. Pour que la parodie opere, explique l'auteur, il est imperieux que Ie texte parodie soit reconnu du public. C'est l'arrimage. Pire encore,Ie «parasitage »! lei, Julien file une ingenieuse metaphore pour faire cornprendre les mecanismes de la parodie. Celle-ciagirait comme un gui accroche au chene. ...

pdf

Share