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  • Le Problème de l’incroyance auxviiiesiècle par Paul Pelckmans
  • Mladen Kozul (bio)
Le Problème de l’incroyance auxviiiesiècle par Paul Pelckmans Québec: Les Presses de l’Université Laval, 2010. 160pp. CAN $25. ISBN 978-2-7637-9233-0.

Dans son introduction, Paul Pelckmans fait référence au livre de Lucien Febvre, Le Problème de l’incroyance au XVIesiècle que le titre de son livre, précise-t-il, salue de « très bas » (xx). Mais il établit des parallèles entre les termes du débat dans les deux cas. Febvre réagissait aux thèses d’Abel Lefranc, selon lesquelles les tours irrévérencieux de Rabelais étaient en réalité les signes d’un athéisme consommé. Selon Febvre, au contraire, l’emprise de la croyance religieuse sur l’esprit au xvie siècle était telle que la libre pensée de la trempe que Lefranc voulait lui attribuer était à peu près impensable. De longues décennies après Febvre, on peut se demander si la simple opposition croyance/incroyance suffit pour rendre compte des nuances culturelles et philosophiques qu’impliquent les différents degrés de dissidence face à la religion dans sa forme officielle, quelles que soient les formes historiques et les conditions de possibilités de cette dissidence.

De sa part, de la thèse de Febvre, Pelckmans préfère mettre en avant le constat d’un décalage de mentalités qui nous sépare inexorablement des certitudes passées. Et en l’occurrence, d’un xviiie siècle français plongé dans des évidences quotidiennes et culturelles de la croyance traditionnelle—de « toute une routine catholique » qu’on a perdue depuis (xxi). Sans mettre en cause la sécularisation de la culture française au cours du xviiie siècle ni le rôle des Lumières dans ce processus, les six chapitres qui composent le livre s’attachent à montrer que « les Lumières françaises [...] ne se trouvaient pas seulement en face d’un catholicisme toujours foisonnant », mais qu’elles « s’y rattachent aussi par plus d’un biais » (xviii). Il est en effet incontestable, comme le souligne Pelckmans en présentant la thèse qu’il entend défendre, que « les auteurs les plus portés aux nouveautés évoluaient inévitablement dans un monde qui restait majoritairement d’obédience catholique, dont ils ne pouvaient pas ne pas subir l’imprégnation » (xviii). [End Page 619]

Annoncé à l’ouverture du livre, ce projet soulève deux questions. D’abord, quel statut donner aux éléments à la fois culturels et textuels que mettent en relief les analyses de Pelckmans et qui indiquent que « le xviiie siècle reste marqué par tout une routine catholique dont nous avons du mal, dans notre xxie siècle sécularisé, à mesurer l’impact quotidien » (xxi)? Les auteurs convoqués trouvent à « leur corps défendant » ou « sans penser seulement à s’en défendre », toute sorte de « reflexes » « formules », « répertoire d’arguments et d’idée toutes faites », « décors », « routines », « familiarité » et « vieilles évidences » catholiques (xviii, xx, xxi, 26). Ainsi les analyses que propose Pelckmans de Cleveland et du Doyen de Killerine de Prévost, auxquels il consacre son premier chapitre, lui font observer que le narrateur prévostien peut très bien attribuer le même événement de la vie d’un personnage à la Providence et à la fortune. Le même événement se trouve alors renvoyé, observe Pelckmans, « a quelques ligne de distance, à des instances logiquement incompatibles » (25). Les facilités de plume, les automatismes langagiers de se genre, permettent-ils de conclure à la proximité entre l’écrivain et les « vieilles évidences » catholiques? Elles témoignent, nous dit Pelckmans, « de la robuste familiarité avec un lexique coutumier » (26). Cela parait incontestable. Mais de quel poids ces « évidences » langagiers pèsent-elle dans le positionnement religieux des auteurs? Pelckmans souligne le caractère « très élémentaire, [...] presque artisanal » (xix) de sa démarche ainsi que son manque d’exhaustivité. Il prend le parti de collecter des traces laiss...

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