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  • Un auteur en quête d'éditeurs? Histoire éditoriale de l'œuvre de Montesquieu (1748-1964)
  • Sylvie Romanowski
Un auteur en quête d'éditeurs? Histoire éditoriale de l'œuvre de Montesquieu (1748-1964). Par Catherine Volpilhac-Auger, avec la collaboration de Gabriel Sabbagh et Françoise Weil. (Métamorphoses du livre). Lyon: ÉNS Éditions/Institut d'histoire du livre, 2011. 448 pp.

La directrice actuelle des Œuvres complètes de Montesquieu, Catherine Volpilhac-Auger, est bien placée pour écrire (avec deux collaborateurs) cette histoire éditoriale centrée sur L'Esprit des lois. Elle divise cette histoire en trois phases, celle des premières éditions jusqu'à 1750, celle de 1750 à 1889 et la phase allant de 1889 à 1964, chaque stade étant compliqué pour différentes raisons. Pendant la première période, où l'éditeur et le libraire ne font qu'un et où la notion d'édition scientifique n'existe pas, le texte de Montesquieu voyage à travers l'Europe avant de revenir au petit monde concurrentiel des éditeurs parisiens. Comme Montesquieu se désintéresse du livre imprimé mais fait très attention à son texte, il envoie plusieurs listes d'errata divergentes. Après le tournant du milieu du siècle Montesquieu devient une gloire nationale, et les éditions se multiplient alors que la famille garde jalousement les manuscrits, qui ensuite émigrent à Londres avant d'être renfermés de nouveau à La Brède. Montesquieu s'éclipse pendant la Révolution, qui le considère trop modéré, avant de devenir l'objet de plusieurs éditions pendant le dix-neuvième siècle. Les manuscrits étant toujours inaccessibles, les éditeurs enrichissent leurs publications avec d'autres textes, certains écrits par Montesquieu qui révèlent de nouvelles facettes du grand homme, et d'autres, biographiques, polémiques et historiques, pour renouveler son image. Le principe de l'édition scientifique à la fois critique et complète ne s'imposera qu'à la fin du dixneuviè me siècle. Entre temps l'édition de Plassan en quatre volumes (1796-98) monumentalise Montesquieu en l'idéalisant: les soucis de la bienséance et de la facilité de lecture qui dominent encore ne seront écartés qu'au siècle suivant. Cette édition s'impose néanmoins jusqu'à l'édition en sept volumes de Laboulaye de 1875-79, qui constitue la première édition vraiment complète de Montesquieu. Après 1889, quand la famille vend les manuscrits, qui deviennent désormais accessibles, on entre dans une période nouvelle, mais on se tromperait en s'attendant à des éditions dignes du vocable 'scientifique'. À la fin du dix-neuvième siècle, la France catholique est frileuse devant Montesquieu encore trop associé avec les Encyclopédistes toujours entâchés d'athéisme. Et au vingtième siècle, si la notion d'édition complète est acquise, l'édition complète de Roger Caillois (1949-51), celle d'André Masson (1950-55) et 'l'Intégrale' de Daniel Oster et Georges Vedel (1964) ne répondent nullement aux critères scientifiques et Volpihac-Auger les juge défecteuses. Dans une courte Conclusion, elle rappelle ce qu'exige une édition complète, critique et savante digne de ce nom: un travail d'équipe, surtout pour une œuvre si multiple, et un code précis de déontologie qui exige non seulement la reproduction mais la justification des choix qu'il faut nécessairement faire. Elle donne à la fois des leçons de rigueur scientifique et de modestie à méditer. L'ouvrage est accompagné de plusieurs annexes: les errata de L'Esprit des lois, de brèves analyses des bibliothèques de Bordeaux et de La Brède, ainsi qu'un rappel des principes qui président au travail que Volpilhac-Auger poursuit avec des collaborateurs depuis 1999. Trois index — des noms, des œuvres et des bibliothèques — complètent [End Page 556] le volume, écrit d'un style vif et agréable, qui intéressera tous les lecteurs de L'Esprit des lois.

Sylvie Romanowski
Northwestern University
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