Regard sur … L’identité des jeunes en contexte minoritaire (review)

Regard sur … L’identité des jeunes en contexte minoritaire, un ouvrage dirigé par Annie Pilote et Sílvio Marcus de Souza Correa présente sept monographies sur les minorités linguistiques, ethniques et religieuses, établies de longue date au Canada et au Brésil. Le livre réunit les collaborations de neuf auteurs, incluant en conclusion une réflexion de Madeleine Gauthier. Ancrées dans la sociologie de la jeunesse, les enquêtes mettent en valeur l’expérience des jeunes dans l’étude des nouvelles identités sociales prenant forme aujourd’hui au sein de minorités traversées par la mondialisation. Les auteurs s’intéressent au travail réalisé par les jeunes sur eux-mêmes sur le plan des appartenances culturelles, dans les diverses modalités de passage à la vie adulte, et enfin, en fonction des conditions objectives de mobilité sociale.

Les analyses présentent une mise en contexte détaillée de l’histoire du groupe minoritaire et mettent en valeur des méthodologies de recherche principalement qualitatives. Elles abordent l’identité des jeunes à partir de perspectives théoriques variées. Magnan (chapitre 1) relate l’importance de changements générationnels chez les jeunes Anglophones du Québec alors que Pilote (chapitre 2), traitant des jeunes Francophones du Nouveau-Brunswick et Brumer (chapitre 7), des jeunes Juifs brésiliens, mettent en lumière les mécanismes d’intégration à la collectivité, dans une perspective d’ouverture sur le monde. L’école en tant qu’institution socialisante y trouve une place prépondérante. De Souza Correa (chapitre 3) reprend, dans la perspective d’une sociologie critique, le thème de la fluidité des frontières ethniques pour illustrer les transformations identitaires que vivent les jeunes Brésiliens d’origine allemande et réfléchir au phénomène des frontières, cette fois au carrefour de la multi-appartenance (58 et suiv.) et dans le brouillage (62) des contours au sein de la société globale. Il fait alors référence aux clivages sociaux liés au positionnement particulier des individus, ce qui est révélateur de la complexité des parcours et bricolages identitaires, à savoir de l’épaisseur de l’entre-deux dans lequel se retrouvent les jeunes minoritaires (Pilote et de Souza Correa, 7).

Girard et Leblanc (chapitre 4) abordent la question des rapports sociaux de domination historiquement constitués en analysant la situation de jeunes Autochtones du Québec vivant en milieu urbain et en région, et s’identifiant, en particulier, à la nation innue, attikamek ou algonquine (83). Ils font état des conditions de vie précaires et des choix difficiles auxquels ces derniers sont confrontés. Gagnon (chapitre 5) souligne le manque de reconnaissance juridique que subissent les jeunes Métis francophones du Manitoba, une situation qui met en évidence les disparités de statut économique et symbolique entre les diverses minorités, ainsi que le contexte triplement minoritaire du groupe étudié : à savoir en tant que Francophone, que Métis francophone au sein des Métis, et que Métis au sein des Francophones (100). L’étude de Bédard (chapitre 6), retraçant les trajectoires de mobilité de jeunes Juifs montréalais d’origine marocaine, ainsi que la question de l’attrait du judaïsme, illustre bien les effets de la mondialisation plutôt que de la tradition sur les représentations sociales, d’où l’importance que revêt le travail de déconstruction des catégories établies précédemment pour désigner les divers groupes.

Toute entreprise a ses propres limites. Les études de cas offrent l’avantage de proposer une (re)lecture en profondeur de réalités socio-historiques en transformation. Elles sont, à ce titre, très intéressantes, non seulement pour mieux connaître les contextes particuliers, mais également pour explorer la complexité des processus sociaux...