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Nineteenth Century French Studies 32.1&2 (2003-2004) 159-161



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Vachon, Stéphane. Le Dernier Balzac, Du Lérot, éditeur. Tusson, Charente, 2001. Pp. 46. Sans ISBN

Dans ce petit livre de présentation très agréable Stéphane Vachon reprend pour son compte personnel une question qui a hanté des générations de balzaciens.

Pourquoi Balzac tôt entré en littérature comme on entre en religion a-t-il cessé dans les dernières années de sa vie de considérer qu'il n'appartenait qu'à son œuvre, choisissant semble-t-il le désœuvrement comme invention d'une manière d'être et d'un mode d'existence? Mutation brusque? Plutôt résultat de métamorphoses successives qui aboutissent en fin de parcours à une "exceptionnelle présence à soi" imposée par le corps usé et malade. L'œuvre alors est écartée du chemin qui mène l'écrivain à "la contemplation de son moi essentiel" dans une sorte de retour à l'origine.

Alors, fini le rêve de maîtriser l'infini d'une œuvre toujours à compléter et qui semble "obéir à une certaine névrose de la fuite en avant?" Plusieurs thèses et hypothèses ont été avancées pour tenter d'expliquer cet abandon du grand œuvre, et dans la première partie de son essai (qui en comporte deux) Stéphane Vachon les rappelle en les analysant brièvement: [End Page 159]

- Thèse physiologique: Elle invite à voir en Balzac un cas exemplaire de sa propre théorie selon laquelle tout homme n'a qu'une somme d'énergie à dépenser.

- Position idéaliste: Conscient de l'impossible tâche d'étreindre la réalité par la parole, face au chantier immense déjouant ses espérances, Balzac aurait été conduit àl'impuissance.

- Explication littéraire:Le romancier se trouve rattrapé par sa création, témoin "la réduction croissante de l'écart entre le temps historique et le temps diégétique des derniers romans," l'impossibilité de doter d'aventures inédites les personnages reparaissants soumis au vieillissement et dont l'it- inéraire est souvent achevé dans les grandeurs d'établissement: ainsi de Bianchon, De Marsay, Rastignac.

- Hypothèse commerciale: En publiant ses œuvres complètes l'écrivain exhibe son titre de propriétaire, circonscrivant sa "surface commerciale" (l'expression est de lui); belle illustration du combat balzacien pour la propriété littéraire.

- Cause historique: La révolution de 1848, la République qui s'ensuit et le suffrage universel contrarient l'utopie politique de Balzac théoricien du légitimisme. Sa représentation de la France devient dès lors obsolète; d'où sans doute l'abandon du roman au profit du théâtre. "Il faut faire du théâtre et promptement" écrit-il le 24 mars 1848.

- Explication psychologique: Balzac enfant narcissiquement blessé goûte enfin un juste repos auprès de madame Hanska, sorte de mère rédemptrice. L'enfant qui sommeille encore et toujours au cœur de l'écrivain jouirait alors d'une "reconnaissance" trop longtemps différée. "Ce n'est ni un démiurge ni un Prométhée qui écrivit La Comédie humaine, c'est l'enfant rieur que Balzac ne fut jamais" affirme à juste titre Stéphane Vachon; mais sans doute l'écrivain a-t-il compris sur le tard que la littérature ne saurait guérir la détresse d'une enfance maltraitée.

Que conclure de tout cela sinon "que chacune de ces manières de voir contient sa part d'exactitude et sa légitimité" comme le constate Stéphane Vachon au terme de son recensement. Mais il ne saurait s'arrêter là car son dernier Balzac à lui se situe au-delà de toutes les analyses partielles, dans une sorte de synthèse où les couleurs d'un prisme transfigurateur s'abolissent au profit d'un grand blanc silencieux. Peut-être d'un "Rien" très moderne?

Au seuil de la seconde partie de l'essai, Gilles Deleuze est convoqu&eacute...

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