Abstract

En 1738, Mère Marguerite Ste. Gertrude Marquez et six Ursulines embarquèrent pour la côte Est de l’Inde, leur objectif étant de remplir la mission apostolique de leur ordre en ouvrant une école aux fins d’éduquer les filles des colons français de la ville de Pondichéry. Deux ans plus tard, cependant, elles ne disposaient toujours ni d’un cloitre, ni d’un confesseur, ni d’une école et pas davantage de la garantie que tout ceci allait être prochainement mis à leur disposition. Les conditions de vie étaient en fait si effroyables que Sœur Marie Chrysostome, l’une des six Ursulines, fit la requête d’être rapatriée en France en raison du fait qu’elle “ne peut pas, de par son tempérament, exister dans un tel endroit sans vivre dans un cloitre, un endroit qui lui est étranger et dont les habitations ne sont pas différentes de celles des laïcs.” Les nonnes de Marquez vivaient dans des quartiers temporaires du district européen d’une ville en prise à un climat politique tendu dont les 100 000 habitants étaient en majorité des Indiens de religion hindou. Sœur Marquez craignait que d’autres de ses Ursulines ne suivent l’exemple de Sœur Chrysostome. La subsistance de ces six nonnes ursulines, déterminées quoique vulnérables, souleva parmi les autorités locales la question clé suivante: “Qui est le véritable dirigeant des Ursulines de Pondichéry?” Cette simple question est révélatrice des luttes complexes de pouvoir entre les diverses autorités coloniales de l’Inde française et des colonies françaises en général. Ce cas d’un groupe de sœurs ursulines et de leur mission ratée en Inde, quoique peu connu, n’en est pas moins lourd de sens dans l’histoire des missionnaires ursulines; il éclaire de surcroît d’un nouveau jour les questions relatives à la femme, l’Église et l’État dans le projet colonial français en Inde.

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