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Reviewed by:
  • Remarques sur la langue françoise
  • Claire Badiou-Monferran
Claude Favre de Vaugelas: Remarques sur la langue françoise. Édité par Zygmunt Marzys. (Travaux du Grand Siècle, 34). Genève: Droz, 2009. 1002 pp. Pb €72.11.

Fruit de trente-cinq ans de travail, l’édition critique de Zygmunt Marzys témoigne d’une maturation et d’une familiarité avec son objet qui en fait un ouvrage d’exception. Cette somme de plus de mille pages comprend une Introduction tout à la fois dense et nourrie, le texte de l’édition originale des Remarques (1647), dont elle reproduit l’orthographe et la ponctuation, une importante bibliographie primaire et secondaire, ainsi qu’un index raisonné des noms propres, des morphèmes et des notions. S’inscrivant dans la tradition des travaux de critique génétique, l’ouvrage reproduit, pour chaque remarque, sous un même titre, le texte imprimé et, s’il y a lieu, le ou les passages correspondants du manuscrit 3105 de la Bibliothèque de l’Arsenal. Cette perspective, qui n’est adoptée par aucune des éditions antérieures des Remarques, constitue un apport considérable. Elle permet de dégager diverses strates temporelles d’écriture, rendant compte de l’évolution d’un projet initialement consacré au ‘bien écrire’, et qui s’est progressivement élargi au ‘bien parler’, afin de pouvoir établir ‘une norme de comportement linguistique en société’ (Marzys, p. 44). Elle explique entre autres les déphasages entre la célèbre définition du ‘bon usage’ figurant dans la ‘Préface’, en date de 1647, et certaines remarques rédigées antérieurement. L’autre apport, tout aussi décisif, de cette édition concerne l’appareil de notes. Conformément à la tradition, Marzys distingue les notes relevant de l’établissement du texte de celles portant sur le contenu. Or, dans ces dernières, l’éditeur intellectuel ne se contente pas seulement d’articuler le propos de Vaugelas à celui de ses prédécesseurs (Malherbe, Maupas, Oudin, Marie de Gournay) et de ses successeurs (notamment Chiflet, négligé par Streicher et Brunot). Il confronte aussi systématiquement le métadiscours des Remarques avec ‘l’usage réel’ (Marzys, p. 9) des contemporains, à partir des données—essentiellement littéraires, là est la limite du travail—fournies par la base Frantext. Ce constant va-et-vient entre l’histoire des représentations linguistiques et l’histoire de la langue est sans précédent dans l’histoire éditoriale des Remarques. Par-delà sa valeur intrinsèque, il invite la communauté des chercheurs à repenser les liens de l’histoire externe et de l’histoire interne. À tous ces titres, l’édition de Marzys est amenée à faire date. On pourra éventuellement regretter que son Introduction, reprenant la structure de celle que son auteur avait fait paraître en 1984, pour présenter le texte de la seule Préface, ne soit pas en mesure d’intégrer les avancées les plus récentes de la littérature sur Vaugelas (parmi d’autres, les travaux de Hélène Merlin-Kajman), et discute des positions certes toujours actuelles mais plus anciennes (comme celle de Harald Weinrich à propos des liens entre la doctrine des Remarques et le droit coutumier). Mais, comme s’en explique son auteur, ‘c’est dans les notes [et non dans l’Introduction] qu’on trouvera l’essentiel de [son] travail’ (Marzys, p. 10): beau choix éditorial, qui rend pleinement hommage au genre des ‘Remarques’ et à la manière de Vaugelas. Avec cet ouvrage, dont l’extrême richesse égale la fiabilité, on dispose enfin d’une grande édition critique des Remarques.

Claire Badiou-Monferran
Université Paris-Sorbonne – Paris 4
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