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Reviewed by:
  • Les Querelles dramatiques à l'âge classique (XVII e-XVIII e siècles)
  • Sabine Chaouche (bio)
Emmanuelle Hénin , éd. Les Querelles dramatiques à l'âge classique (XVII e-XVIII e siècles). Louvain: Peeters, 2010. xii+342pp. 45€. ISBN 978-90-429-2071-2.

Cet ouvrage se propose de retracer la manière dont s'est institué l'art de la dispute dramatique sous l'Ancien Régime. Comme le rappelle fort justement Emmanuelle Hénin dans son introduction, la querelle est constitutive de la vie théâtrale et méritait donc d'être abordée dans son ensemble. Il ne s'agissait pas de regrouper une mosaïque de textes sans rapport les uns avec les autres mais au contraire de trouver un fil directeur permettant de mieux comprendre le fonctionnement des querelles et leur impact sur la vie théâtrale et civile.

Le public semble un élément important de ces querelles, d'abord essentiellement élitistes (Civardi), dans la mesure où il est partie prenante et, au fil du temps, de plus en plus « engagé » dans le processus cri tique. Il a un « horizon d'attente » et en ce sens promeut ou désavoue certains auteurs lors de la représentation, auteurs qui se voient alors obligés de composer avec les règles et le goût ambiant, le plus souvent antagonistes, tout en gardant une liberté de création-ainsi de Racine (Hénin). Il se fait ou non le complice des débats, voire des cabales, prenant ouvertement parti pour un acteur, un genre, un dramaturge (querelle de L'École des femmes, théâtres de la foire ou des Bouffons: Merlin-Kajman, Rubellin, Naudeix). Il apparaît, au même titre que la critique savante et doctrinale, une instance jugeant la chose théâtrale certes de manière plus ou moins fine, voire plaisante ou superficielle comme le signalent les anecdotes dramatiques (Marchand). Cette « autorité » du public est tantôt niée, tantôt intégrée aux querelles d'ordre géné rique (tragi-comédie, tragédie lyrique), poétique ou esthétique. Molière contre par exemple guerres et chicane par la théâtralisation des critiques dont il est la cible, mettant en scène le public des salons (Dandrey).

La querelle regroupe deux entités qui sont le plus souvent en complète opposition: d'une part le public mondain ou populaire qui influence la représentation, c'est-à-dire le spectacle, permettant son [End Page 549] succès ou non, de même que son évolution vers des formes nouvelles ou modernisées (Spielmann, Poirson, Leblanc); et d'autre part le public savant qui pense l'écriture dramatique et institue la doctrine classique. De la dialectique entre ces deux instances en permanente tension qui pourraient symboliquement être représentées par les lecteurs privilégiant une approche textocentriste et littéraire, et les spectateurs épris de spectaculaire et d'éphémère, naît une démarche éditoriale double: celle qui consiste à retranscrire le spectacle et à raviver les souvenirs de la représentation, ou celle qui vise à faire du texte une œuvre littéraire vouée à la postérité (Lochert).

Un siècle après la Querelle du Cid, le public a conquis sa place dans le champ des disputes et a même droit à la parole: il est considéré comme une force politique idéale (Rousseau) ou réelle (De Belloy). Il se voit donc inclus dans les discussions de la seconde moitié du xviiie siècle, centrées sur la moralité et sur la nécessité, ou non, du théâtre (Chihuia). Une pièce telle Le Siège de Calais et les débats philosophiques relatifs au patriotisme et au cosmopolitisme illustrent le lien entre esthétique théâtrale et politique (Hillerin). C'est à la même époque que le modèle français est remis en question sous l'influence d'autres formes théâtrales venues d'Italie ou d'Angleterre. On assiste alors à la querelle prolifique « des coins » discutant le rapport entre langage et musique. S'affrontent les partisans de l'opera buffa et les partisans de l'opéra français, mais...

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