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  • La politique climatique européenne :entre nécessité de la vertu et vertu de la nécessité
  • Éloi Laurent (bio) and Jacques Le Cacheux (bio)

Introduction : l'Union europeenne, nouveau leader ecologique global

L'Union européenne (UE) est devenue au cours des années 1990 et 2000 le leader écologique global, capable d'influencer les politiques environnementales bien au-delà de ses frontières, prenant la suite des Etats-Unis qui assumaient cette fonction dans les années 1960, 1970 et une partie des années 1980 (voir par exemple sur ce point Keleman et Volger, 2010). Le dossier climatique est emblématique de ce passage de témoin : les Etats-Unis bloquent depuis une décennie les négociations climatiques et sont revenus à reculons à la table des négociations sous l'administration Obama, les mains vides d'engagements sérieux. La politique climatique européenne est à l'inverse désormais bien enserrée dans un faisceau de règles et d'objectifs contraignants, une véritable stratégie de développement soutenable à moyen terme et des préférences collectives robustes, qui s'affirment y compris dans le contexte de la crise économique.

Mais cette vertu écologique européenne procède pour l'heure davantage d'une heureuse nécessité que d'un choix politique résolu : l'UE dispose de peu de ressources naturelles, elle importe massivement son énergie fossile et elle a donc appris, avant que l'exigence climatique ne s'impose, à économiser les ressources naturelles nécessaires à son développement. Il y a donc une part de contrainte bienvenue dans la vertu climatique de l'UE. Qui plus est, l'UE maîtrise encore trop insuffisamment son impact écologique [End Page 9] global qui réduit d'autant la portée des efforts environnementaux qu'elle déploie à l'intérieur de ses frontières. Nous examinons dans cet article ces différentes dimensions de la politique climatique européenne pour montrer de quelle manière celle-ci s'articule avec le modèle européen de développement. Nous commençons par insister sur l'importance du leadership climatique européen.

L'Union européenne, l'indispensable leader par l'exemple

Au printemps de 2009, l'Union européenne (UE) a adopté son « paquet climat-énergie », incluant l'objectif ambitieux de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) en 2020 par rapport à leur niveau de 1990. En mars 2011, la Commission européenne a proposé de viser un objectif de réduction encore plus élevé, de 25 %, alors même que les négociations climatiques internationales paraissent bloquées, en faisant valoir que la « grande récession » mondiale et européenne a réduit le coût économique des baisses d'émissions (Commission européenne, 2011). En affichant ces objectifs quantitatifs en l'absence de progrès substantiels dans les autres régions du monde, la Commission européenne choisit d'engager résolument l'Union sur la voie du « leadership par l'exemple », stratégie adoptée par le Conseil dès le printemps 2007, et qui a montré certaines limites depuis lors.

Mais alors que les avancées du sommet de Durban s'annoncent limitées, il importe de commencer par reconnaître que sans l'Union européenne ces négociations internationales n'existeraient probablement même pas, les pays en développement jugeant très sévèrement - et à raison - les leçons de développement soutenable que leur administrent des pays développés qui n'ont pas respecté leurs propres engagements de la première phase du Protocole de Kyoto (signé en 1997, entré en vigueur en 2005 et parvenant à expiration en 2012).

L'exemple de la conférence de Copenhague, qui s'est avéré être une cruelle déception après avoir soulevé un espoir sans doute démesuré, est à cet égard révélateur. Le pouvoir normatif européen a bel et bien pesé à Copenhague : c'est parce que l'Union a inscrit dans le marbre de sa loi la limite de 2 degrés de réchauffement qu'elle est devenue la règle commune ; c'est parce que...

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